Page 14 - EcoRéseau n°18
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n°18
PaNOraMa Grand Angle - La santé de demain
l’homme, que la nature a génétiquement programmé pour vivre 125 ans. À peine plus qu'un corbeau. si ce diplômé de l’ENa et HEC, président de la biotech DNa Vision spécialisée dans le séquençage de l’aDN, pro- voque avec une prédiction si « transhumaniste » – l’uti- lisation de la science et des techniques pour améliorer les caractéristiques phy- siques et mentales de l’homme –, c’est bien parce qu’il souhaite générer une réflexion plus transversale sur le nouveau monde qui s’ouvre. Beaucoup de cher- cheurs-entrepreneurs restent enfermés dans leurs spé- cialités et n’ont aucune idée de la manière dont toutes ces disciplines interagiront. « La prospective dans un domaine aussi complexe est toujours hasardeuse, c’est un peu comme interroger les spécialistes des freins, puis des réacteurs et des cockpits... pour esquisser l’aéronautique du futur. Souvenons-nous qu’en 1989, 100% des chercheurs en génétique étaient per- suadés que nous ne sau- rions jamais séquencer
« A l’avenir un module “Big Data” sera ajouté à la formation des étudiants en médecine », Laurent Alexandre, chirur- gien neurobiologiste fondateur de Doctissimo
souches humaines. Une réussite qui a ouvert la voie à l’impression d’organes humains complets : artères, muscle, pancréas ou cor- nées, etc., peuvent être ré- parés par ce moyen. Nombre de laboratoires académiques planchent sur le sujet depuis seulement deux ou trois ans et à part Organovo, le poids lourd de la filière, seules une quinzaine de petites so- ciétés ont émergé. « L’ins- titut Gartner montre bien que le nombre et la teneur des publications sont ceux d’une technologie encore naissante. Mais nous pou- vons dès maintenant réflé- chir à des patchs de micro- tissus implantés », révèle Fabien Guillemot, chercheur de l’Inserm, cofondateur de la start-up en bio-impression Poietis. Pour lui, le champ des possibles est ouvert, no- tamment en matière de gref- fons : « Grâce à la puis-
l’ADN... Mais elle est es-
sentielle », illustre le fon-
dateur du site Doctissimo.
Le recensement des ruptures
les plus extrêmes permet DES TISSUS
de théoriser la médecine Impossible par exemple de demain, et donc la so- d’occulter l’impression 3D
de tissus vivants, même si nous n’en sommes qu’aux balbutiements. En 2013, une équipe de chercheurs de l’université Heriot-Watt d’Edimbourg est parvenue à imprimer des cellules
Biomup et ses implants chirurgicaux résorbables
chimie et de génétique à Paris-VI qui a suivi un post-doc à la Harvard Me- dical school de Boston, ne cesse d’étonner en proclamant que la re- programmation d’un génome, végé- tal, animal ou humain est (presque) devenu un jeu d’enfant... Concrète- ment, les ciseaux permettent un cou- per-coller des gènes avec une précision moléculaire. La société est donc à la tête d’un nombre impres- sionnant de projets dans le domaine de l’agriculture, de la biologie et de la thérapeutique. Les activités vont
ciété qui l’accompagnera.
Cellectis, champion de l'ingénierie du génome
CHAPITRE 2
LA RÉGÉNÉRATION
andré Choulika a cofondé sa société en 1999 sur un transfert de technologie de l’Institut Pasteur, introdui- sant des méganucléases, sortes de « ciseaux molécu- laires » permettant de modifier l’aDN d’une cellule de façon ciblée. a 50 ans, cet ancien étudiant de bio-
« Les matériaux utilisés pour réparer le corps humain sont de trois types : métallique, plastique ou biologique. Les deux premiers ne se résorbent pas à la différence du troisième qui peut être métabolisé par le corps et disparaître. » sylvain Picot résume facilement tout l’intérêt médical des produits de sa société Biomup à l’ère de la médecine regénérative. En 2005, alors jeune diplômé de l’INsa de Lyon, il crée avec Pa- tricia Forest, également ingénieure biochimiste et le docteur
Christian Gagneux, leur enseignant, une start-up pour « valoriser la re- cherche publique dans le domaine des colla- gènes ». Ces protéines présentes dans les tissus humains et animaux, qui servent de substrat au dé- veloppement des cellules, mais que l’on ne sait pas fabriquer de façon artifi- cielle. Le savoir-faire de Biomup réside dans la technologie de purifica- tion du collagène animal
de la production de cellules pour l’industrie pharma- ceutique au développement de thérapies cellulaires contre les cancers ou le diabète, en passant par la mise au point de biocarburants ou de plantes modifiées. Les partenaires ? Total, Limagrain, Monsanto, Bayer, les Instituts nationaux de la santé américains (NIH)... Cellectis combat aussi la leucémie en développant l’immunothérapie adoptive, qui isole des lympho- cytes T de sujets sains et les modifie génétiquement pour qu’ils s’attaquent spécifiquement aux cellules cancéreuses de malades. L’époque où andré Choulika est entré à l’Institut Pasteur, en 1988, pour étudier le génome des levures, est bien lointaine. Mais c’est là qu’il a découvert les méganucléases, qui se révèlent de redoutables scalpels moléculaires. Dans les années à venir tout sera séquencé. La société cotée de l’an- cien président de France Biotech, l’association fran- çaise des biotechnologies, ne manquera pas de clients.
et la production d’implants chirurgicaux résorbables pour ré- parer le tissu cardiaque, favoriser la cicatrisation, réaliser des substituts osseux, stopper les saignements. En l’espace de dix ans la jeune pousse lyonnaise s’est bien développée. Elle em- ploie aujourd’hui 55 personnes, a créé l’an passé deux filiales commerciales aux Etats-Unis et en allemagne et a réalisé 3,2 millions d’euros de Ca en 2014. PF
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Mars 2015
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