Liz Truss prépare un choc fiscal

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On l’a quittée vêtue de noir, aux obsèques d’Elizabeth II. La voilà qui, aux termes des funérailles nationales les plus émouvantes du siècle, retrouve enfin sa matière favorite. La politique.

Elle avait promis des baisses d’impôts par averses. Quelque chose de spectaculaire… Les observateurs faisaient la moue. Une fois au pouvoir, elle mettra de l’eau dans son vin, pensaient-ils en cœur. Il faudra bien ! Erreur. Liz Truss compte bien rester fidèle à sa campagne et provoquer un véritable choc fiscal.

Le « mini-budget » qu’elle a présenté aux Communes en début de semaine est tout sauf une simple mesure technique. Son Chancelier de l’Échiquier (ministre des Finances), Kwasi Kwarteng, tente à ses côtés de défendre « une nouvelle ère économique ». Un « événement fiscal » comme l’on dit pudiquement outre-Manche. Casser la baraque pour la reconstruire autrement. Mettre en danger le système pour sortir le Royaume-Uni de sa croissance en stagnation, subie depuis vingt ans. Liz Truss rêve de retrouver un taux de croissance annuel  supérieur à 2 %. Projeter la Grande-Bretagne vers de nouvelles Trente Glorieuses.

Aides publiques et baisses d’impôts : cocktail explosif pour la dette

Truss la libérale ouvre le premier volet de son plan à contre-courant. Elle veut protéger les ménages de la hausse tonitruante et insupportable des prix de l’énergie. Coût pour l’État ? 150 milliards par an. Un mal nécessaire face à une inflation spectaculaire qui frôle les 10 %.

Cette mesure « étatiste » est la seule à s’insérer dans l’horizon des Trussonomics. Le reste du programme ouvre la voie à un libéralisme à tout crin. Il s’agit des plus grandes baisses d’impôts depuis cinquante ans. Les deux chocs fiscaux décidés par Margaret Thatcher, en 1982 et 1988, font pâle figure à côté. Ces coupes dans la fiscalité équivalent à 1,54 % du PIB britannique. Considérable ! 45 milliards de livres qui ne viendront plus abonder le budget de l’État. Et qui seront un poids en moins pour le contribuable.

Pour compenser ces politiques très coûteuses, et éviter la faillite des finances publiques, Truss compte signer l’an prochain un emprunt géant de 70 milliards. Le reste sera compensé par des réformes de structure.

Truss tente un coup de poker risqué

Truss, volontariste en diable, compte aussi bouleverser les normes qui entravent à son avis la bonne marche de l’économie britannique. Elle s’apprête à créer des zones d’investissements spéciales dans des régions délaissées comme le Norfolk. Avantages fiscaux, normes supprimées dans ces endroits : tout sera fait pour attirer les investisseurs. Tant pis si au passage, il faut fermer les yeux et effectuer quelques renoncements sur les normes écologiques ou les quotas de logements sociaux…

Ce remède « ça passe ou ça casse » consistera aussi en l’annulation des hausses d’impôts prévues et budgétées par Boris Johnson. L’impôt sur les entreprises ne passera pas à 25 % et restera cloué à 19. Le plafond sur les bonus touchés par les banquiers de la City, qui jusqu’ici déclenchait un impôt spécial, vole en éclat. Sky is the limit ! L’impôt sur le revenu sera réduit pour les tranches les plus élevées. Objectif : inciter encore et toujours à l’investissement. Truss prévoit aussi, mais pour plus tard, de serrer la vis sur le droit de grève et l’allocation chômage. L’encadrement sera plus strict encore…

Les marchés, eux, s’inquiètent et s’alarment. La livre sterling dégringole à son plus bas face au dollar. Du jamais vu depuis 1985. La Banque d’Angleterre indique « suivre de près » la situation. Un avertissement poli adressé à Downing Street…

Ceux qui pensaient que Liz Truss incarnerait un retour à la modération après les années Johnson en sont pour leurs frais. Cette femme n’a pas froid aux yeux et tente le tout pour le tout. Jusqu’à entraîner dans son pari l’économie britannique toute entière. Pour le meilleur ou pour le pire ? Wait and see.

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