Jean-Luc Mélenchon invité par Caroline Roux dans une émission diffusée depuis la Guyane

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L’espace d’un soir, les téléspectateurs de France 2 ont pu découvrir les enjeux de la Guyane, territoire situé à 7 000 kilomètres de l’hexagone.

Le chef de la France insoumise, aujourd’hui dépourvu de tout mandat public, était, ce 12 janvier, l’invité de Caroline Roux sur France 2. Une émission intéressante, diffusée depuis la Guyane française. 

Drôle d’endroit pour une rencontre. Sous une bâche blanche balayée par les pluies, à quelques mètres d’une grande rivière qui débouche sur la canopée amazonienne, Caroline Roux et Jean-Luc Mélenchon se regardent dans le blanc des yeux. Pour la première fois dans l’histoire de la télévision française, une émission politique d’ampleur a été programmée depuis un territoire d’Outre-mer. Un « événement » sans doute, pour reprendre le nom de l’émission. Bien sûr, il y a eu des critiques… L’émission n’a d’ailleurs pas du tout séduit les téléspectateurs avec seulement 5,3 % du public. France 2 battue par W9 !

Certains esprits s’indignent d’un tel dispositif qui induit par définition un coût économique important – sans parler du bilan carbone. Un mouvement de boycott a été lancé par les affidés de la majorité, qui pestent sur les réseaux sociaux. Emmanuel Macron ne fut pourtant pas mal servi : il a eu droit, l’automne dernier, à deux soirs de prime time diffusés à quinze jours d’intervalle. Monsieur Mélenchon – comme Madame Le Pen, qui aura les honneurs d’une soirée au printemps – n’aura qu’un soir.

Loin des yeux, près du cœur ?

Belle initiative pourtant que cette délocalisation en Guyane, au cœur de cette France américano-latine. Loin, très loin c’est vrai des habituelles préoccupations de « la France des studios ». Faut-il rappeler que ce territoire est grand comme le Portugal ? Que nous y partageons notre plus grande frontière avec le Brésil (730 kilomètres) ? Que la plus vaste commune française, Maripasoula, s’y établit (18 360 km2) ? Que sa population, en hausse de 89 % depuis 1999, compte 294 400 habitants ?

Dans l’hexagone, nous connaissons bien mal nos outre-mer. Ces territoires nous rappellent constamment que la France, loin d’être une puissance seulement occidentale, est une nation universelle, dotée du deuxième domaine maritime mondial. La Guyane, plus encore, est une énigme. Ce territoire compte pourtant d’infinies richesses, qu’il s’agit de préserver et de mettre en valeur. Sa capacité de développement est immense. Tout juste les métropolitains savent-ils que de nombreux problèmes s’y entrecroisent : orpailleurs, braconniers, migrations illégales… Sans compter la grande pauvreté qui s’abat sur les deux grandes villes : Cayenne et Saint-Laurent-du-Maroni.

Plus de 500 militaires gardent notre frontière et veillent sur les habitants. Un reportage de Laurent Bignolas donne la parole aux habitants du village amérindien de Kali’na de Prospérité. Yopoto Roland Sjabere, chef coutumier, mène une lutte pour s’opposer à l’installation d’une centrale électrique qui aboutirait à la destruction de 140 hectares de forêt.

Au cœur de l’enjeu spatial

Il y a aussi la fameuse base spatiale de Kourou. L’émission ose en consacrant une grande partie du débat à l’espace, cette « nouvelle frontière de l’humanité ». Un enjeu majeur trop souvent relégué derrière des débats de second rang. Jean-Luc Mélenchon entend ainsi lutter contre « la privatisation de l’Espace » (déjà à l’œuvre). L’ex-candidat à l’élection présidentielle souligne d’ailleurs que SpaceX, le grand projet d’Elon Musk, est largement soutenu par les fonds publics de la Nasa. Si l’ancien candidat à la présidentielle Jacques Cheminade regarde la télévision, il doit rire jaune, lui qu’on traitait de « fantaisiste » lorsqu’il abordait ses questions en 1995, 2012 et 2017.

Ukraine : la vision de Lula

Bien qu’à des milliers de kilomètres, Caroline Roux a tout de même réservé une partie de l’émission au dossier ukrainien. La position de Jean-Luc Mélenchon, relativement prudente, est également inquiète face à l’escalade de l’armement qui est à l’œuvre.

Son grand ami, le président Lula (très salué en Europe) avait résumé la vision largement partagée dans les pays en développement – lors de sa campagne présidentielle. Ainsi, dans un entretien au Time daté du 4 mai dernier, l’ancien syndicaliste déclarait, au sujet de Volodymyr Zelensky : « Je vois le président ukrainien être applaudi par tous les parlementaires [européens]. Ce type est aussi responsable de la guerre que Poutine. Une guerre n’a jamais un seul coupable ». « Il voulait la guerre. S’il n’en voulait pas, il aurait négocié un peu plus ».

Lula poursuit : « On dirait qu’il fait partie d’un spectacle. Il est à la télé matin, midi et soir […] Il devrait être à la table des négociations. » Jean-Luc Mélenchon réagit : « Ce ne sont pas mes mots ».

Plus personnellement, Jean-Luc Mélenchon semble enterrer une quatrième candidature élyséenne : « Je ne suis pas candidat à ma succession. » Toutefois, il argue d’éventuelles « circonstances » qui pourraient, éventuellement, faire en sorte que… Ah, les « circonstances » ! Mélenchon reste le bon élève de Mitterrand et applique bien sa fameuse maxime… « On ne sort de l’ambiguïté qu’à son propre détriment ».

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