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« Blue Monday ». Cette grotesque invention anglo-américaine signifie que le troisième lundi de janvier est censé être le « jour le plus triste de l’année ». Occasion de faire le point sur notre santé mentale.
Mauvaise météo, courte durée d’ensoleillement, retombée de la magie des fêtes… Rien d’anormal. Plus globalement, la société française est aux prises avec une déprime durable et menaçante. Les valeurs de l’optimisme doivent la contrer !
Une pure invention marketing. Le « Blue Monday » n’est rien d’autre. Pourquoi donc en parler ? Parce que ce jour inventé par les voyagistes britanniques au début des années 2000, dans l’idée de vendre des vacances au soleil, trouve, cette année, un écho tout particulier.
Il y a urgence pour le moral des Français. Une étude qu’une coïncidence a voulue concomitante avec le « Blue Monday » prouve que notre peuple va mal. Santé publique France, en partenariat avec l’institut BVA, publie ainsi son baromètre de la santé mentale. Des chiffres qui inquiètent.
41 % des Français sont angoissés ou déprimés
Certes, les Français ont depuis toujours une sévère tendance au pessimisme et semblent acquis, à les entendre, au syndrome du « tout est foutu ! ». Mais imaginez : 4 personnes sur 10 confient se trouver dans un état dépressif ou anxieux. Pour l’angoisse, c’est 24 %. Pour la dépression, 17 %. Un moral sinistre qui n’est qu’en très légère amélioration depuis la fin des confinements. Faut-il croire que « le monde d’après », tant loué, n’était qu’un mirage ? Si l’on compare à la période prépandémique, le résultat est sans appel. L’angoisse grimpe de 11 % et la dépression de 7 %. L’étude de Santé publique France interroge, car c’est ce même institut public qui appelait sans cesse au « reconfinement ». Une méthode brutale dont on connaît désormais le coût en matière de santé mentale. « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes », disait Bossuet…
Même si 79 % des Français déclarent « avoir une perception positive de leur vie en général », ces 41 % de malheureux doivent être considérés comme une priorité nationale. 69 % des Français déclarent avoir des problèmes de sommeil. Pire : 1 sondé sur 10 avoue avoir ressenti, au cours de l’année écoulée, des pensées suicidaires !
Femmes et jeunes encaissent le coup
Contrairement à l’impression générale, la covid-19 se révèle être une bonne affaire pour l’industrie du tabac. 55 % des fumeurs ont gardé une consommation stable. 19 % diminuent la dose et 27 % avouent augmenter le nombre de cigarettes. 6 % des fumeurs ont commencé à consommer du tabac durant la pandémie.
L’alcool, en revanche, enregistre un léger repli. 65 % des Français sont dans la stabilité de leur consommation pré-épidémique. 11 % boivent davantage qu’auparavant, 24 % le font moins. Pour le sport, la réponse est claire : 57,6 % des Français font moins que les 30 minutes d’activité physique quotidienne. De mauvaises surprises alors que le système de santé est lui aussi en grand danger.
Sans surprise, les femmes sont beaucoup plus touchées par ce coup de blues général. Elles sont particulièrement sujettes à l’angoisse et au manque de sommeil. Mais ce sont surtout les jeunes qui inquiètent. Les 18-24 ans développent bien plus que les autres catégories des troubles psychologiques majeurs.
L’appel d’Elon Musk et Fabrice Luchini
Après l’application « Stop Covid », le gouvernement va-t-il lancer l’application « Stop Déprime » ? Le monde numérique est la racine de ce mal-être collectif qui gangrène. Les jeunes, particulièrement exposés à ce fléau, voient leur palette émotionnelle modifiée. Elon Musk l’a rappelé dans un tweet : « Instagram rend les gens déprimés et Twitter les met en colère. » N’oublions pas le dévastateur « Tik Tok » qui produit les pires ravages dans la jeunesse – et dont l’interdiction totale devrait être envisagée au plus vite.
Donnons la parole à Fabrice Luchini, talentueux contempteur du monde dématérialisé. En octobre dernier, il déclarait à TV Magazine : « Je suis comme les gens de notre époque, j’ai les mêmes défauts. Je suis accro à la télévision et à cette cochonnerie de portable ! C’est vraiment un outil étonnant : il permet de réécouter toutes les interventions de Jean-Luc Godard ou, si notre cerveau se laisse aller, de ne s’abreuver que de clash, de colères et devenir de plus en plus binaire… C’est aussi une invention très grave ! La courtoisie, la délicatesse, le respect, la curiosité, la richesse intérieure sont menacés. Il n’y a plus de regards. La plus grande catastrophe après la guerre, c’est le portable ! Et je pèse mes mots. »
Rappel que le théâtre, le cinéma, la littérature et la poésie peuvent être des baumes utiles et même salvateurs face à la déréliction du monde. La culture comme remède à la mélancolie ?