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Lundi 16 mai, c’est l’ancienne ministre du Travail, Élisabeth Borne, qui, favorite de la première heure, a coché toutes les cases définies par le Président de la République. Bon courage…
Son nom se trouvait dans les petits papiers du président de la République. Favorite à la succession de Jean Castex, avant même la réélection d’Emmanuel Macron, Élisabeth Borne a tenu bon la rampe face à la jungle des concurrents – réels ou qu’on lui prêtait. À l’arrivée, l’une des plus grandes fidèles du chef de l’État a été récompensée lundi 16 mai. Élisabeth Borne est devenue Première ministre.
« Chère Élisabeth Borne, Madame la Première ministre, écologie, santé, éducation, plein-emploi, renaissance démocratique, Europe et sécurité : ensemble, avec le nouveau gouvernement, nous continuerons d’agir sans relâche pour les Françaises et les Français », a déclaré Emmanuel Macron sur Twitter. Élisabeth Borne devient, 30 ans après Édith Cresson (1991-1992) la deuxième femme seulement à occuper la fonction de Premier ministre. Ce mois de mai 2022 marquera donc l’histoire de la Ve République.
Une femme à Matignon
« La classe politique reste misogyne contrairement à la population française. J’ai été élue maire, députée. Jamais je n’ai rencontré de misogynie parmi les électeurs. Mais dans la classe politique, oui », a affirmé la seule femme avant Élisabeth Borne à avoir fréquenté Matignon, Édith Cresson. C’était sous Mitterrand. Élisabeth Borne, elle aussi, est parvenue à briser le plafond de verre d’une classe politique machiste.
Nommée parce que c’est une femme ? Trop caricatural, évidemment. Emmanuel Macron souhaitait une femme à l’Élysée, certes. Mais n’avons-nous pas trop tendance à s’attarder sur la forme ? Sans doute. Même si Borne elle-même alimente le débat : « Je dédie cette nomination à toutes les petites filles. »
Technocrate
Alors oui, Élisabeth Borne est une femme. Mais toutes les femmes ne peuvent pas accéder au rang de Première ministre. Car la polytechnicienne aligne de l’acquis. Notamment dans des groupes privés, publics ou semi-publics : un passage chez Sonacotra dans les années 1990, directrice de la stratégie de la SNCF au début des années 2000, directrice des concessions au sein du groupe Eiffage, puis, du printemps 2015 à sa nomination au gouvernement, présidente de la RATP ! Patiente, Borne a fait son chemin. Ce n’était pas forcément bien embarqué, puisque la Première ministre, qui a perdu son père très jeune, s’est retrouvée avec sa mère – deux filles à élever – qui ne roulait pas sur l’or. Grâce à son école d’ingénieurs « rémunérée par l’État », cette fille de classe moyenne devient autonome financièrement. Symbole de la méritocratie républicaine, chère à Emmanuel Macron.
Une expérience dans le monde de l’entreprise… mais aussi en politique ! Dans les années 1990, Élisabeth Borne devient conseillère au ministère de l’Éducation nationale auprès de Lionel Jospin puis, à partir de 1992, de Jack Lang. Elle sera aussi directrice de cabinet de Ségolène Royale. La nouvelle Première ministre est une technocrate. Macron le sait et pourra compter sur la rigueur de l’ex-ministre du Travail – passée aussi par le ministère des Transports et de la Transition écologique. C’est sur ce dernier volet que le Président de la République entend insister lors de son second quinquennat. Élisabeth Borne sera donc directement en charge « de la planification écologique ». Reste à savoir si Borne est une écolo convaincue… EELV lui reproche sa « politique de petits pas » car elle reste favorable au nucléaire dans le mix énergétique et a retardé de 2025 à 2035 la réduction de la part du nucléaire dans la production électrique.
Une opposition qui s’oppose
Sans surprise, Élisabeth Borne ne fait pas l’unanimité. Notamment à la gauche de la gauche : « C’est bien que ce soit une femme, mais il faut voir ce qu’elle incarne politiquement. C’est l’autre nom de la maltraitance sociale et de l’irresponsabilité écologique qu’incarne Emmanuel Macron, lance le député des Insoumis Adrien Quatennens, on lui doit l’ouverture à la concurrence de la SNCF, la fin des tarifs réglementés de gaz, la réforme de l’assurance-chômage, la mise à pied de l’inspecteur du travail Anthony Smith qui avait protesté contre la pénurie de masques en période covid pour le travailleurs, le décalage de 10 ans du plan de réduction du nucléaire », insiste-t-il.
De son côté, Marine Le Pen (Rassemblement national) s’inquiète de la nomination d’Élisabeth Borne : « En nommant Élisabeth Borne comme Premier ministre [la non-féminisation du titre est-elle voulue ?], Emmanuel Macron démontre son incapacité à rassembler et la volonté de poursuivre sa politique de mépris, de déconstruction de l’État, de sacage social, de racket fiscal et de laxisme », estime la finaliste perdante de la dernière élection présidentielle. Une opposition qui s’oppose… Même défaillante, notre démocratie n’est pas morte.