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Il y a un an, la députée des Yvelines marquait l’Histoire. Et devenait la première femme élue à la présidence de l’Assemblée nationale. Yaël Braun-Pivet espère secrètement renouveler l’exploit… Cette fois à l’Élysée.
L’Assemblée nationale est revenue au centre du jeu. Face à la majorité introuvable, le gouvernement doit y ferrailler. Yaël Braun-Pivet se félicite de cette Chambre à l’image de la France. Elle veut la rendre utile.
Des lettres hideuses, glaçantes, ordurières. Reçues à l’Assemblée ou à son domicile privé. Yaël Braun-Pivet a découvert l’antisémitisme sur le tard. Il aura fallu qu’elle entre en politique pour connaître « le vol noir des corbeaux sur nos plaines ». Dans la classe politique, lorsqu’elle révèle ces courriers, l’indignation est heureusement générale. Et l’enquête ? Elle piétine. La police doit arbitrer entre les urgences. On ne retrouvera sans doute jamais les salauds.
Au-dessus de la mêlée
Présidente de l’Assemblée nationale, au cœur du chaudron, le quatrième personnage de l’État avance, malgré la violence d’un monde politique où tout est permis. Depuis juin dernier, elle a pour mission de veiller à la sérénité des débats. Rien d’évident face au chahut, au vacarme, parfois à la haine qui surgit dans l’hémicycle… Elle tient le choc. Elle a le cuir épais. Comme ce jour où le député Louis Boyard, vautré dans son fauteuil, l’insulta « d’agente de l’Élysée ». Le tout en empêchant de parler une Première ministre soudain prise de tétanie à la tribune.
Il hurlait ! L’ancien dealer écopa d’un rappel au règlement. L’indigne ne semblait pas dans son état normal. Avait-il abusé de la buvette ? Braun-Pivet fut contrainte, au printemps, de renforcer les contrôles face à des députés parfois en état d’ébriété. Selon Le Parisien, un élu de la Nupes aurait même été aperçu en train de vomir dans une poubelle…
Première femme à occuper cette fonction, « YBP » trace sa voie. En neutralité, pour respecter l’équité qui doit prévaloir entre les groupes. Elle s’entend bien avec son vice-président RN, Sébastien Chenu. En subjectivité, pour ne pas trop s’éloigner de ses amis de Renaissance. Dans son parti d’origine, certains l’accusent de jouer trop ouvertement une partition personnelle. Nous y reviendrons.
Pour l’Élysée, elle fait figure de mouton noir. Emmanuel Macron n’a jamais voulu d’elle. Il la méprise avec méthode. La rebelle s’est faite élire présidente de l’Assemblée contre sa volonté. Le candidat présidentiel, Roland Lescure, hérita du ministère de l’Industrie.
De Coluche à Macron
Yaël Braun-Pivet se présente comme une descendante de « l’immigration slave, juive polonaise et juive allemande, avec des grands-parents entrés en France avec des visas touristiques et une valise, dans les années 1930 ». Son grand-père, tailleur juif polonais en exil, fut médaillé de la Résistance.
Son idéal de Justice, elle le comble grâce à des études de droit, qui la conduisent jusqu’au barreau. De 2003 à 2012, elle s’expatrie pour suivre son mari à Taïwan, au Japon puis au Portugal. Lorsqu’elle revient sur le territoire national, elle crée une start-up et s’investit à plein dans Les Restos du Cœur. Elle dirigea bénévolement l’antenne de Chanteloup-les-Vignes puis de Sartrouville. En 2016, intéressée par le programme d’Emmanuel Macron, elle décide de franchir les portes d’un parti. Son désir ? Repousser les vieux clivages. Elle se présente aux législatives et devient députée. Presque par surprise.
En 2017, dès son arrivée au Palais Bourbon, cette députée novice parvient à se faire élire à la tête de la très prestigieuse commission des Lois. Déjà, elle s’impose, sans attendre. Elle sera houspillée durant les débats de la commission d’enquête sur « l’affaire Benalla ». On l’accuse de favoriser l’exécutif, de mettre la poussière sous le tapis. Lentement, elle tisse sa toile. Jusqu’en 2022, où elle décroche enfin le perchoir. Au mépris des usages partisans, elle se rapproche alors de Gérard Larcher, son homologue du Sénat. Les deux présidents échangent beaucoup. Après tout, ils ont les Yvelines en commun.
Elle pense à 2027 en se maquillant
D’abord, cela a fait rire. Lorsqu’un entrefilet dans la presse dévoile son ambition présidentielle, « YBP » garde le silence… Pourtant, celle qui assure « ne pas avoir de plan de carrière » n’insulte pas l’avenir. Face à Philippe, Le Maire, Castex ou Darmanin, elle incarne la différence. Le choix d’une femme qui n’a jamais été l’affidée d’Emmanuel Macron. De quoi séduire l’électorat centriste ? L’ingénieuse propose de renouveler le pacte citoyen par une idée originale en France. La démocratie directe. Yaël Braun-Pivet voudrait consacrer une journée annuelle à l’organisation de référendums nationaux et locaux. Emmanuel Macron s’est dit « intéressé ». Une manière de répondre – gentiment – par la négative ?
Les indiscrets d’ERB
Gérard Larcher trahi par son micro • Séance de questions au gouvernement. Installé dans son fauteuil, Gérard Larcher distribue la parole. Ici, pas de tumulte, les séances de la Chambre haute sont sérieuses. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des Outre-Mer, tente d’expliquer un dossier. Un exposé sans brio. Le président du Sénat se retourne vers le Secrétaire général du Sénat. Main devant la bouche, il lance à mi-voix : « Il est vraiment très nul, hein ? ». « Il s’est surpassé », lui répond son interlocuteur. Pas de chance Messieurs, le micro était ouvert…