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La figure du centre-droit nous quitte. Paradoxal, François Léotard incarnait la politique des années 1980, dans ses excès et ses vérités.
Certains le voyaient aller très haut. François Léotard fut une figure talentueuse de sa génération politique, fort d’une culture réelle et d’une capacité d’entraînement. Porte-parole des idées libérales, il rêvait de rompre avec le social-étatisme.
« C’était lui qui avait raison. Pas moi ». En 2003, en publiant À mon frère qui n’est pas mort (Grasset) François Léotard rendait à son frère, Philippe, le plus bel hommage. Entre lui, l’homme politique talentueux, et son frère disparu, comédien écorché vif, bouillonnant d’émotion, il n’y avait à la fin qu’une seule exactitude. Leurs parcours antithétiques, rivaux et pourtant passionnés, ne firent jamais d’eux des êtres lointains l’un de l’autre. Ils étaient du même bois, même si la presse eut beau jeu de les présenter sous les traits « du ministre de la Défense et du ministre de la défonce ».
François Léotard est parti. Ce nom, comme un écho, renvoyait aux années 1980 et 1990. Flamboyance de l’argent roi. Sacré destin, bien qu’inachevé, que celui de cet homme de foi venu en politique avec l’envie jalouse de venger son père. Et qui découvrit un soir, après deux décennies de bataille, qu’au pouvoir de la parole il préférait la force décuplée du silence.
Entré en politique pour venger son père
Fréjus, 1959. Le barrage de Malpasset ne résiste pas à la crue très violente qui dévaste la région. 423 victimes sont emportées dans le drame. André Léotard, père de François et Philippe, est maire de la ville depuis quelques mois. Une indigne campagne de presse fait de lui le responsable de la catastrophe. Il quitte la mairie aux élections suivantes, en 1971.
Après un mandat d’intervalle, son fils décide de se présenter pour laver l’honneur de son père. « La vengeance est un sentiment très noble », déclare ce jeune haut-fonctionnaire qui a manqué de peu d’entrer dans les ordres, après plusieurs mois comme novice à l’abbaye Sainte-Marie de la Pierre-qui-Vire, dans l’Yonne. Ensuite, il s’est engagé au centre-droit. Dans cette première campagne municipale, il est élu, haut la main. Jamais battu pendant plus de vingt ans.
Entre la culture et les armées
Le jeune loup monte vite et bien les marches du pouvoir. Au début des années 1980, il s’empare du Parti républicain, celui de Giscard, et lui donne une tonalité rare en France, libérale. C’est l’époque des Reagan et des Thatcher. En 1986, lors de la première cohabitation, il rêve du ministère de la Défense. Mitterrand oppose son veto. Il atterrit à la Culture. Un ministère qui va bien à cet homme de lettres, fort cultivé. Auprès de Jacques Chirac alors Premier ministre, il lance la privatisation de TF1. Bonne idée économique, mauvaise donne culturelle…
Vient la deuxième cohabitation. 1993. Cette fois, c’est Édouard Balladur qui entre à Matignon. François Mitterrand, qui a appris à apprécier Léotard, accepte sa nomination à la Défense. Léotard devient l’ailier gauche de la balladurie, Sarkozy étant l’ailier droit. Les deux s’imaginent à Matignon en cas de victoire de leur champion. Tant pis pour eux : Chirac renaît de ses cendres et gagne la présidentielle de 1995. Sarkozy entame sa traversée du désert – elle durera sept ans. Léotard, quant à lui, se retire peu à peu de la chose politique. Empêtré dans les remugles de multiples affaires judiciaires, dont la plus noire reste le dossier Karachi, il est condamné à deux ans d’emprisonnement avec sursis et 100 000 euros d’amende. La part sombre d’un homme qui était loin d’être un saint.
Le voici à présent du même côté que son frère, Philippe, qui chantait si bien Ferré et qui jouait si juste. Sic transit gloria mundi.
Les Indiscrets d’ERB
Ségolène Royal dézingue Macron • Elle distribue les claques. Révoltée comme jamais, Ségolène Royal revient dans le débat avec un livre publié aux éditions du Rocher : Refusez la cruauté du monde – Le temps d’aimer est venu. Un message que l’on croirait adressé directement à Emmanuel Macron, dont elle fustige la « cruauté mesquine ». Selon elle, le président est animé par « une gouvernance par la peur », « sans doute conseillée par McKinsey ». Sur LCI cette semaine, elle charge la barque. « Il y a une colère qui conduit à certains excès, mais ils s’expliquent par la cruauté des politiques […] Le gouvernement récolte ce qu’il a semé ».