Tropisme asiatique

Pas mal d'idées lors du brainstorming organisé au sein d'un MBA sino-français
Pas mal d'idées lors du brainstorming organisé au sein d'un MBA sino-français

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Les écoles de commerce françaises ne dupliquent plus leurs formations en Asie, elles les globalisent.

 

Pas mal d'idées lors du brainstorming organisé au sein d'un MBA sino-français
Pas mal d’idées lors du brainstorming organisé au sein d’un MBA sino-français

Logique de Hub and spoke (réseau en étoile) de l’enseignement supérieur, développement de l’inter-continentalité académique de haut niveau, campus français en Asie… Les logiques de déploiement des business schools françaises ne visent pas seulement à la rentabilité de nouvelles formations ni à l’exploration de nouveaux marchés. Elles aspirent à faire de ces ancrages locaux de nouveaux piliers dans l’enseignement du business, qui se veut désormais global.

 

La Chine comme tête de pont

L’Empire du Milieu demeure le premier terrain de chasse des écoles françaises. En Chine, on peut dénombrer 44 instituts de coopération sino-étrangère et 700 programmes de formation toutes nationalités confondues (l’etudiant.fr). Selon les moyens et la force des liens tissés, le déploiement prend alors des formes diverses : un bureau de représentation pour GEM, Sup de Co La Rochelle ou l’Iéseg BS, un institut Franco-chinois à Suzhou pour le triumvirat que forment Kedge BS, Montpellier III et Paris IV. Un campus enfin pour Skema BS également à Suzhou, ou à Shanghai pour l’EM Lyon. De même pour l’ESSEC à Singapour et Télécom Ecole de management avec la Lanzhou University. Aucune école n’y échappe. Toutes considèrent l’Asie comme un moyen d’internationaliser les cursus. Pour choyer les dirigeants, HEC a ainsi décidé de délivrer des Executives mastères à Shanghai et Pékin en part time tout comme Neoma adresse aux top managers son DBA (Doctorate in Business Administration) avec la fameuse université de Jiaotong. L’EM Lyon, elle, reste fidèle à son ADN en ayant développé une offre de formation dédiée à l’entrepreneuriat international, avec le Global entrepreneurship program. Les différents modes de représentation en terre asiatique témoignent également du glissement d’une logique de « mère à fille » à une relation de « sœur à sœur » entre les écoles de commerce françaises et les établissements chinois. Autrement dit, d’une volonté de duplication et de délocalisation des formations, les business schools cherchent davantage à globaliser leurs formations. « Nous avons développé une offre de MBA part-time avec l’université de Jiaotong qui s’adresse aux cadres d’entreprise. Il s’agissait du même programme que sa version française, à la différence que le recrutement et l’organisation s’opèrent à Shanghai », explique Michel Gutsatz, associate dean & MBA director chez Kedge. Dans l’élan de ce programme et du partenariat avec Jiaotong, l’Executive MBA a été créé en 2010. Cette année, la formation exécutive a intégré le top 30 du classement des EMBA selon le Financial Times (cf. baromètre). Une réussite qui fait de l’inter-continentalité un facteur de succès pour les formations s’adressant aux dirigeants.

 

L’Asie, nouveau hub de la formation

Le potentiel asiatique s’illustre donc par le succès des formules tri-continentales, comme en atteste le dernier palmarès des EMBA tenu par le Financial Times (cf. baromètre). Le but de ces formations globales revient à asseoir des programmes sur plusieurs sites de renommée internationale, et de connecter ces différents temples académiques pour aboutir à des apprentissages sur mesure où le choix des majeures et des électifs autoriseront une visite systémique des différents continents, selon l’expertise en lien avec le dynamisme économique de la « city-region ». Phénomène que l’on retrouve d’ailleurs dans les programmes ad hoc des grandes écoles destinées aux multinationales. « C’est à partir de la Chine que nous traitons l’Asie. D’autres programmes viennent structurer les relations avec l’Inde le Japon, Taiwan, etc. Notre stratégie évolue d’une volonté d’internationalisation à une stratégie de globalisation », précise Tugrul Atamer, Vice-Dean for Global Affairs à l’EM Lyon. L’innovation majeure réside dans le passage d’une logique de partenariat de point à point à des schémas de type « hub and spoke » avec dans certains cas, des campus off-shore pour améliorer la capacité d’agir des grandes écoles. La stratégie en « hub » permet ainsi de privilégier des échanges en étoile autour d’un nœud géographique ou s’organisent le choix des destinations selon l’école ou l’université et la majeure qu’elle dispense. Cette logique permet donc de desservir des marchés d’enseignement secondaires dont les flux ne justifient pas d’ancrage direct à l’échelle internationale ou intercontinentale. Outil de massification et de convergence des savoirs, ces plateformes permettent de multiplier les destinations de formation. On s’inscrit dans cette optique dans une volonté de desserte « glocale » – le local connecté au global – et non plus segmentée par les marchés de l’enseignement. Dans le cadre de l’EDHEC Risk-Institute, par exemple, les campus de Singapour et de Londres accueillent ainsi des étudiants et managers au sein d’un programme dispensé en alternance, le MSc in Risk & Investment Management. Toujours dans cette même optique, un nouveau partenariat avec Sun Yat-sen University (Chine et Taïwan) établit une nouvelle tête de pont pour Neoma vers l’Asie du Sud Est. L’année scolaire 2014-2015 annoncera aussi l’arrivée d’un nouveau campus à Singapour pour l’ESSEC. « Notre BBA deviendra global à compter de la rentrée 2015. Nous voulons faire de l’ESSEC une institution multipolaire, qui se caractérisera par une pensée différenciée à la fois locale et globale, passant par un recrutement académique scientifique et une pédagogie différents. Notre objectif est d’être ancré dans dix villes stratégiques en Asie et de constituer un hub à partir de Singapour », souligne Jean Michel Blanquer, Directeur Général de l’ESSEC.

 

Un choix de carrière à la carte

Les écoles peuvent également engager des initiatives qui dépassent le cadre des écoles : Neoma Business School a ainsi lancé le premier Institut Confucius « Business » de France. « Les premiers contrats en DIF ont vu récemment le jour dans le cadre de l’Institut avec des entreprises haut-normandes partenaires. Et en Chine, nous poursuivons les rencontres avec les entreprises chinoises pour de nouvelles opportunités de formations. Néoma développe son partenariat avec Nankai située à Nanjin, troisième ville chinoise, afin de pourvoir cette institution de nouvelles formations exécutives », explique Céline Davesnes, DGA des programmes chez Néoma. Cette polarisation mondiale des formations favorise bien évidemment les échanges et ouvre certaines possibilités de carrière : « Nos anciens de moins de 28 ans évoquent la prise de postes à responsabilité seulement accessible à des managers senior de 50 ans en Europe », évoque Céline Davesnes. Mais seule une poignée de Français participe à ces formations de haut vol en Asie : 20% de la cohorte de l’EMBA de Kedge, par exemple, est composé de personnes qui n’ont pas la nationalité chinoise, dont à peine quelques Français. La demande de formation se calque davantage sur le développement économique chinois à forte dominante industrielle. « Les participants proviennent aussi de multinationales européennes ou américaines. C’est dans ce type de structure que le besoin d’un MBA se fait ressentir. Mais aujourd’hui, la demande émane de l’industrie, et de plus en plus des entreprises d’Etat chinoises », rapporte le doyen de Kedge.

 

Article réalisé par Geoffroy Framery

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