Et pourquoi pas les vacances illimitées ?

Quand le sunburn remplace le burn-out…
Quand le sunburn remplace le burn-out…

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« Finis tes devoirs avant d’aller jouer »

Les entreprises où les salariés ne comptent pas leurs jours de congés existent. Eldorado pour jeunes talents, ou illusion des temps modernes ?

Initié par Netflix en 2004, le concept d’ « open vacances », émoustille les rêveurs en période de rentrée et mérite d’être explicité. Une révolution de la relation employeurs/employés, arrivée en France par le biais d’Indeed, de la start-up PopChef ou encore du groupe immobilier vosgien Avinim, où les salariés sont responsables de leur travail et peuvent prendre des vacances s’ils en ont besoin.

Confiance et bénéfices mutuels

De quoi améliorer la motivation, et donc la performance de salariés impliqués, qui savent qu’ils peuvent se reposer quand bon leur semble. De quoi réduire le turnover aussi, tout en travaillant la marque employeur. « J’ai fait connaissance avec ce concept au Centre des jeunes dirigeants (CJD) que je fréquente depuis 20 ans. Il se prête au secteur immobilier, très irrégulier dans son activité depuis la crise, et donc vecteur de stress pour les salariés », explique Martial Demange, gérant du groupe vosgien Avinim. Ainsi les collaborateurs qui ont travaillé à fond sur un dossier peuvent prendre une pause, « et ce sans calculer les jours qu’ils doivent garder pour des évènements et occasions privés ».

Des abus qui peuvent survenir des deux côtés

Un système qui induit de fait une confiance réciproque, et un oubli de la culture des horaires pourtant très répandue. « Il s’agit d’un pacte moral. Je ne suis pas à l’abri d’un tire-au-flanc. Mais je ne vais pas handicaper les autres pour un éventuel passager clandestin. Et ce dernier sera automatiquement exclu par les autres », révèle celui qui dirige à Remiremont une dizaine de salariés, qui d’eux-mêmes ont insisté pour que cette disposition ne s’applique à tout nouveau salarié qu’au bout de 24 mois. De plus grandes entités dans des secteurs différents s’y sont essayées, comme Virgin dans ses sièges de Londres ou New-York. L’attitude de l’employeur aussi doit être irréprochable. Si les objectifs ne sont pas atteints, que risquent les salariés ? « Cela peut s’apparenter à un mode de management quasi-militaire, rigoureux, exigeant. Les résultats doivent suivre, et le salarié est entraîné dans la spirale de la culpabilité et de l’autocensure. Partir en congé, c’est affirmer que le job est terminé ; or il n’est jamais vraiment terminé », avertit Pascal Grémiaux, président-fondateur d’Eurécia, éditeur français d’un logiciel de gestion administrative du personnel et de gestion des talents, dédié aux PME. Cet amalgame entre vie privée et vie professionnelle peut conduire les salariés les moins réfléchis au burn-out, ou à des tensions accrues sur la répartition du travail. « Un problème juridique peut aussi survenir. Un salarié sur le départ pourrait arguer du fait qu’il a eu moins de jours de vacances que ses collègues et ainsi saisir le Conseil de prud’hommes », prévoit Pascal Grémiaux.

Culture du résultat et bienveillance, les notions clés

« Globalement, hormis depuis quelques semaines avec les journalistes, nous n’avons jamais reparlé de cette pratique qui est en vigueur depuis trois ans ; c’est la preuve que cela fonctionne », se réjouit Martial Demange, qui dit ne jamais avoir eu à demander de statistiques précises, les années se compensant et les gens ne tombant pas dans l’excès. « Les collaborateurs ne cherchent pas à savoir combien leur voisin a pris de congés. » La transformation d’Avinim s’est en fait opérée naturellement grâce à sa culture initiale. « Il a toujours fallu servir le client en priorité, et les salariés se sont donc vu confier les clés de la boutique bien avant. Ils ne devaient jamais “planter” un dossier. C’est une question de valeurs. Le changement de mœurs n’a donc pas été si important, nous avons simplement donné plus de flexibilité au temps de travail », rappelle celui qui conserve tout de même un système de fiches, « pour savoir où se trouvent les collaborateurs en cas d’accident. Ils sont évidemment payés pendant ces périodes, ce sont bien des vacances, pour répondre aux sceptiques de l’extérieur ». Un exemple à suivre ? « Nous ne prétendons pas incarner un modèle, nous sommes seulement dans le témoignage : ce genre de configuration s’applique à un certain type de personne, d’équipe, de culture d’entreprise. » Il faut aussi savoir si le dirigeant est prêt : « Je me suis posé beaucoup de questions la veille de mon annonce. Mais en tant que dirigeant on ne peut pas dire qu’on a confiance, et prévoir en même temps d’aller droit dans le mur en prenant ce genre de mesure de bien-être ». Le Vosgien s’est donc lancé, et n’a aujourd’hui pas à le regretter…

Julien Tarby

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