Temps de lecture estimé : 2 minutes
L’autre malaise au travail, avec la « grande démission »
Il existe la « Grande démission », analysée dans ce numéro, page 38. Mais, presque pire que la démission, se manifeste… le désengagement des salarié·es. Quand on est chef·fe d’entreprise, il y a des cauchemars décidément bien récurrents.
Le crédo de Damien Lambert ? Les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises. « Les dirigeants sont désemparés, confie le patron de Semer & Grandir, cabinet d’accompagnement. Je ne trouve personne ! Ils ne restent pas ! Et sur le dessus de la pile des inquiétudes – et elle est énorme – ils ne s’engagent pas. » Un mal a priori très français, si l’on en croit une étude Gallup, State of the Global Workplace, édition 2021. Oui, le taux d’engagement des salariés français ·es serait parmi les plus bas du monde. Seulement 6 % des personnes interrogées se disent motivées par leur emploi contre 20 % des salariés qui se déclarent à l’inverse totalement désengagés ! Le même Gallup a ainsi établi trois catégories : les engagés, les désengagés, les activement désengagés – les plus terribles, qui rament à contre-sens, voire qui militent et cherchent à faire tache d’huile.
Des statistiques qui ont de quoi affoler les chef·fes d’entreprise. Car le désengagement se traduit en espèces sonnantes et trébuchantes. Selon l’Institut de bienêtre au travail (Ibet, QR code), développé par le groupe Apicil et le cabinet Mozart consulting, le coût se chiffre à 14 310 euros par an et par salarié. Soit une ardoise totale de 94 milliards d’euros, coût annuel estimé du désengagement en France (chiffre extrait du webinair Wittyfit sur l’engagement collectif du 13 avril). De quoi altérer les performances et plomber les comptes des entreprises. Le désengagement constitue l’étape ultime avant la démission (ou le licenciement). Les trois pénalisent.
Les ficelles de l’engagement
Une palanquée de statistiques traite du sujet. 78 % des travailleur ·ses pensent que la reconnaissance déclenche un impact positif sur leur travail. Or, d’après une étude menée par Cadremploi et Deloitte, 77 % des employé·es et 70 % des cadres ne se sentent pas considéré·es à leur juste valeur ! Star des années 2010-2015, le babyfoot n’y change rien. Idem pour le toboggan, récemment implanté dans un siège social à Bordeaux. Les petits accessoires près de la machine à café de la vie en communauté ne changent rien à l’affaire ! « Le pilotage à distance a remis en question le management, note Antoine Lecoq, managing director Pagegroup, spécialiste du recrutement.
La question est probablement moins celle des recrutements que la retenue des collaborateur·rices déjà en place. L’entreprise doit s’assurer de l’adhésion des salariés à la stratégie, à la transformation. C’est à elle de susciter les efforts. Tous ces sujets sont à rebattre. On ne peut plus mettre en place une mécanique pour 10 ou 15 ans. Le monde bouge plus vite ! » Un « merci », un « vous avez eu peu de temps mais les résultats sont bien au rendez-vous », la flexibilité du télétravail – devenu un incontournable –, ces multiples leviers promettent de réduire de 41 % l’absentéisme, de 17 % le turn-over. Mais aussi d’augmenter de 17 % la productivité et de 21 % la rentabilité. Dans un monde hyperconcurrentiel, ces statistiques ont de quoi faire cogiter…
MURIELLE WOLSKI