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Dans un contexte incertain, panachez donc actifs financiers et immobiliers
Que vous ayez épargné, touché un héritage, le fruit de la cession de votre entreprise ou juste réalisé de plantureux bonus, la question reste aussi lancinante que fondamentale : comment bien sécuriser son patrimoine pour soi et ses proches ? Placements financiers ou immobiliers ? Les deux, assurent les spécialistes. « Selon moi, le plus important est de diversifier cette épargne en la panachant autour de trois grandes familles, les valeurs mobilières, comme les actions, l’immobilier et l’immobilier locatif », estime Gilles Belloir, directeur général de Placement-direct.fr. L’enjeu est d’importance, alors que la retraite reste une source d’inquiétude en France et que dans le même temps les trois quarts des Français·es sont hostiles à l’idée de travailler jusqu’à 64 ans, selon une étude d’Altaprofits. D’autant que les risques présentés par l’inflation, ainsi que les défis financiers liés à la relance économique, ont été exacerbés par la pandémie. La France a perdu trois places et se retrouve au 25e rang de l’Indice mondial des retraites 2020 (Global Retirement Index), publié mi-septembre par Natixis Investment Managers. « L’indice mondial des retraites de cette année met à nouveau l’accent sur les priorités et inquiétudes des Français·es en matière de retraite, notamment dans un contexte de crise sanitaire mondiale », a commenté Estelle Castres, directrice de la distribution, France, Benelux, Genève, Monaco et Israël, Natixis Investment Managers.
1 – L’assurance vie
L’assurance vie continue de séduire. En juillet, « le placement préféré des Français » qui a représenté 38 % du patrimoine financier en 2020, a enregistré sa dixième collecte nette positive avec 1,1 milliard d’euros, selon la Fédération française de l’assurance. Ce produit ne manque pas d’atouts. En premier lieu, l’assurance vie va optimiser la transmission jusqu’à 152 500 euros par bénéficiaire lorsque l’assuré·e a alimenté son contrat avant 70 ans. « Au-delà de cette somme, l’impôt est de 20 % », rappelle Gilles Belloir. Après huit ans, la fiscalité sur les retraits est encore plus favorable. « Aussi, l’assurance vie reste le placement phare pour l’épargne de long terme, d’autant qu’il est possible de débloquer une partie du capital en quelques jours en cas de coup dur », assure le professionnel. Selon lui, la baisse des rendements des fonds en euros devrait conduire à rester encore plus vigilants sur les frais. Bien souvent, les réseaux traditionnels appliquent des frais de versement, mais aussi des frais de gestion et sur versement. Aussi, les épargnant·es ont intérêt à étudier l’offre des acteurs digitaux bien moins chers. « Par exemple, Placement-direct.fr ne prélève aucun frais sur les versements et les frais de gestion sont globalement 40 % moins chers que la concurrence traditionnelle, soit de l’ordre de 0,6 % », assure le dirigeant.
Avec l’assurance vie, on investit sur plusieurs classes d’actifs et des zones géographiques variées. Cet avantage est significatif alors que les marchés actions mondiaux ont évolué parfois de manière hétérogène cette année. D’ailleurs, la stratégie des Français·es a changé. « L’assurance vie devient en effet un produit plus sélectif et qualitatif, les assuré·es doivent accepter une part de risque plus élevée. Avec la baisse de leur rendement, les fonds euros sont moins attractifs », observe Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Épargne. Après avoir atteint quelque 33 %, la proportion d’unités de compte au sein de la collecte a dépassé les 40 %, à la fin du premier semestre 2021. Bien conscients de cet appétit pour le risque, les assureurs montent au créneau. L’association professionnelle Gaipare propose depuis fin septembre une nouvelle offre d’assurance vie conçue avec Allianz France. Outre une garantie fidélité, elle donne accès à des supports innovants, comme les UC immobilières et les fonds indiciels type ETF. « Avec Gaipare Fidelissimo, nous offrons à nos adhérent·es un produit financier complet à même de s’adapter au nouvel environnement financier dans lequel nous vivons actuellement, tout en conservant l’ensemble des fonctions qui ont fait depuis de nombreuses années le succès de notre gamme », souligne Alain Burq, président du Gaipare.
Les épargnant·es fortuné·es (ticket d’entrée minimum de 125 000 à 150 000 euros) ont intérêt à se tourner vers les contrats luxembourgeois qui offrent une diversification sur mesure, la portabilité fiscale et le cantonnement fiscal. En France, la réglementation limite l’indemnisation en cas de faillite à 70 000 euros pour l’ensemble des contrats souscrits par un particulier auprès d’une même compagnie par l’assuré·e. Au Luxembourg, tout est garanti.
2 – Le Plan d’épargne retraite
Instauré par la loi Pacte, le PER est un dispositif qui absorbe l’ensemble des anciens dispositifs retraite du marché (Perp/Madelin/Perco et Article 83). Le PER uniformise et simplifie les règles de fonctionnement de l’épargne retraite et propose, à l’épargnant·e, une solution globale plus simple et attractive avec de nouvelles règles de sortie, de versements et de conditions de déblocage sur l’épargne. Sauf cas spécifiques, il est intéressant d’ouvrir un PER pour y transférer l’épargne retraite cumulée pendant sa vie active. De plus, avec l’émergence des courtiers en ligne, les PER proposés sur le marché supportent globalement moins de frais que les anciens produits d’épargne retraite. Le PER est un produit d’épargne retraite mais aussi de défiscalisation. En assurant des versements à titre individuel sur ce placement, les sommes pourront être déduites du revenu imposable. L’épargnant·e bénéficie ainsi d’une réduction de son impôt qui ne rentre pas dans le cadre du plafond des niches fiscales. « Cependant, ce mécanisme d’apparence attractif cache un différé d’imposition puisque la sortie (en capital ou en rente viagère) est taxée dans la plupart des cas. Aussi, il est primordial de fixer sa décision d’investissement sur sa tranche marginale d’imposition. Si le contribuable est imposé à 41 % ou plus, le PER est très attractif », souligne Gilles Belloir. Après avoir déterminé la pertinence d’ouvrir un PER, il conviendra de sélectionner son produit en se montrant vigilant face à l’offre des supports proposés (UC, SCPI, ETF…) ainsi qu’aux frais prélevés. Attention, selon le choix de son PER, ces disparités risquent de s’avérer importantes. De plus, même si le PER existe en version compte titres, privilégier la forme assurance est la meilleure manière d’accéder au fonds en euros et de bénéficier de la fiscalité avantageuse de l’assurance vie en cas de décès. Toujours est-il que ce produit trouve petit à petit sa place dans un contexte anxiogène pour les retraites. Au 31 juillet 2021, le nombre d’assuré·es détenteur·rices d’un PER avoisinait les deux millions.
3 – L’épargne réglementée
Certain·es épargnant·es refusent de prendre des risques et optent alors pour les livrets d’épargne réglementée et les livrets bancaires fiscalisés qui bénéficient de la garantie en capital. Le Livret A tire bien sûr son épingle du jeu. Au mois d’août, il a enregistré une collecte positive de 1,67 milliard d’euros après celle du mois de juillet (1,15 milliard d’euros). « Le Livret A n’est pas pénalisé par son rendement réel négatif en raison de la remontée de l’inflation. Les ménages perdent plus d’un point avec ce placement pour ce motif, placement qui était de 0,5 % en 2020 et qui remonte progressivement. L’inflation atteint 1,2 % en juillet et 1,9 % en août en rythme annuel. La question du relèvement du taux du Livret A pourrait se poser au mois de février 2022 si l’inflation reste autour de 2 points. Il pourrait alors passer de 0,5 à 0,75 %, voire à 1 % », estime Philippe Crevel.
4 – Résidence principale
L’acquisition de la résidence principale constitue la première étape de constitution d’un patrimoine, sauf si bien sûr vous préférez la mobilité géographique. Ceux et celles d’entre vous qui ne peuvent acheter par manque de capitaux de départ pourraient trouver intéressant d’acquérir leur résidence secondaire, qui deviendra principale à la retraite. D’un point de vue économique, le marché résidentiel a relativement bien résisté à la pandémie. Selon une étude du Crédit Agricole, les transactions dans l’ancien n’ont reculé que de 4 % en 2020 tandis que les prix ont accéléré : 6,5 % sur un an au quatrième trimestre. Dans le neuf, en raison d’une insuffisance d’offre, les ventes ont chuté de 24 %, mais n’ont baissé que de 8,5 % pour les maisons individuelles, preuve du besoin d’espace, de calme et bien-être des Français·es avec les confinements.
Face à ces nouvelles aspirations, les promoteurs se mobilisent. Cet été, Cogedim s’est engagé à répondre aux besoins renforcés des Français·es en matière de santé, de bien-être et d’écoresponsabilité au sein de leur logement. Le promoteur s’est fixé des engagements quantifiables et mesurables sur l’ensemble de ses nouvelles opérations. « En tant qu’acteur majeur du marché, Cogedim a la responsabilité de faire évoluer l’offre de logement proposée aux Français. Nous avons l’ambition de leur apporter des logements qui prennent soin d’eux et de la planète », a expliqué avec conviction Vincent Ego, directeur général de Cogedim. Un point de vue partagé par François de Las Cases, directeur général délégué du pôle logements de Sefri-Cime : « Aujourd’hui, l’investissement immobilier et l’acquisition immobilière reflètent un besoin de maîtriser le choix de sa résidence et la crise a été un révélateur du logement en tant que dernier refuge, dans lequel les Français veulent se protéger, mener une vie sociale et même une activité économique. » Le responsable n’a pas été surpris par les nouvelles exigences des clients. « Les surfaces des logements construits par Sefri-Cime sont supérieures à la moyenne de la production, avec toujours ce souci d’être attentif à l’environnement, aux espaces extérieurs paysagés et à cette notion de confort, notion qui a toujours existé », complète François de Las Cases.
5 – L’investissement locatif
Les professionnels se rejoignent sur les perspectives du marché de l’immobilier d’investissement qui devrait continuer à offrir des opportunités de placement sécurisé aux potentiels investisseurs, dispositifs fiscaux comme le Pinel ou non. « Avec 68 futures gares et 200 kilomètres de lignes automatiques attendus pour 2026, le gigantesque projet du Grand Paris Express dynamise déjà le marché immobilier francilien, qu’il s’agisse de constructions neuves ou de programmes de rénovation », assure Cogedim. Bien que le projet en question soit assurément très attractif, la capitale n’est pas le seul territoire plébiscité par les investisseurs. Lyon, Lille, Strasbourg ou encore Toulouse restent des valeurs sûres avec leurs bassins d’emploi importants. Conscient du vif intérêt que les capitales régionales suscitent, le promoteur Cogedim y multiplie les projets. « Depuis la crise sanitaire, les communes de taille intermédiaire représentent un nouvel eldorado pour les citadins en affichant une certaine qualité de vie. Tours, Nantes, La Rochelle, Grenoble, Annecy ou encore Colmar connaissent un regain d’intérêt des investisseurs qui recherchent des logements plus vastes, une rentabilité plus forte, de bonnes perspectives de plus-value et surtout des tarifs plus abordables avec un prix du mètre carré compris entre 1 500 et 2 300 euros », poursuit le promoteur.
Actuellement, un produit a le vent poupe : la colocation. Les étudiant·es et les jeunes actif·ves apprécient particulièrement cette solution pour sortir de l’isolement et bénéficier d’un logement plus grand, tout en réalisant des économies. Comme la demande en logement ne cesse de croître, ce produit est aussi très prisé des investisseurs car il représente un placement ultra-rentable : les biens se louent rapidement et rapportent davantage qu’une location simple. Selon une étude d’Investissement-locatif.com, un appartement en colocation à Lille offrirait un taux de rendement net moyen de 7,5 %, soit bien au-dessus de celui des résidences services, plutôt de l’ordre de 4 %. À cet égard, les professionnels recommandent de cibler les résidences étudiantes où la demande est forte et, éventuellement, les résidences seniors dans la perspective du « papy-boom » .
6 – Les SCPI
Les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) sont une première porte d’entrée dans l’investissement locatif. Elles demandent un apport financier moins élevé que l’achat, par exemple, d’un appartement. « Si l’épargnant n’a pas les capacités financières pour investir dans un bien, il peut toujours se constituer une épargne financière dans une vision de long terme grâce à l’assurance vie ou au PER en intégrant d’ailleurs de l’immobilier via des fonds ou des SCPI », souligne Gilles Belloir. Ces SCPI ont finalement bien traversé la crise grâce à leur diversification. Dans une telle société civile, même spécialisée, les risques sont mutualisés avec des centaines de biens. Pandémie oblige, les SCPI spécialisées dans le résidentiel et la logistique tirent actuellement leur épingle du jeu avec un taux de distribution de valeur sur marché (TDVM, qui indique le rendement de la SCPI) supérieur à 6 %. Sur la deuxième marche du podium, les SCPI diversifiées, qui affichent un TDVM de 4,55 %, comme les SCPI de santé, jusqu’alors plutôt habituées à un rendement proche des 5 %, selon l’observatoire des SCPI par Linxea.
Pierre-Jean Lepagnot