Page 30 - EcoRéseau n°24
P. 30

www.ecoreseau.fr
n°24
PANORAMA L’entretien - Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique
d’entreprise et des actions de performance propres à booster l’actionnariat sa- larié : deux dispositifs re- devenus très compétitifs, grâce à une refonte fiscale et sociale.
Avec cette loi, souhaitez-vous donner des gages à Bruxelles alors que les déficits budgétaires du pays sont dans le collimateur européen ?
Non, tout cela n’a rien à voir avec bruxelles : c’est pour nous-mêmes, et par nous-mêmes que nous al- lons de l’avant. Car les premières victimes du statu quo seraient les Français,
à Paris, bordeaux, Lyon, Marseille, Avignon et bien d’autres. Ensuite, la ré- forme sur le travail domi- nical apportera des oppor- tunités. Notamment aux étudiants, qui pourront tra- vailler le dimanche, en de- hors des jours de cours : ils bénéficieront ainsi d’un complément de salaire pour financer leurs études. Enfin, la réforme sur le travail dominical va ap- porter de la responsabilité et de la confiance. Parce que ce sont les acteurs de terrain qui vont décider d’ouvrir ou non les maga- sins.
Quid de celle sur
les professions réglementées, une réforme encore très polémique ?
C’est normal. Lorsque l’on réforme, on touche toujours à des intérêts acquis, parfois depuis des décennies. il y a donc à chaque fois des mécontents. Mais face à cela, les pouvoirs publics doivent être inflexibles. Car, sur le long terme, la réforme profite à tous, y compris aux professions elles-mêmes. C’est ce qui se passe ici. Nous avons réformé – non pas pour stigmatiser les profession- nels déjà en place – mais pour favoriser les jeunes désireux d’exercer, les femmes, souvent moins bien payées et tous les Fran- çais et entreprises, qui vou-
Bio
Le costume de l'innovation, et ça se voit...
constitutionnellement qui permette de compléter le plafond. En attendant, le référentiel indicatif pour les dommages et intérêts sera prêt pour la fin de l’année.
pas bruxelles !
Comment la loi Macron 2 – qui se profile pour 2016 – pourrait relancer la croissance, notam- ment dans l’univers de la digitalisation ?
A l’ère du numérique, nous assistons à l’émergence d’un nouveau modèle éco- nomique. Un modèle qui forge un paradoxe : d’un côté, celui de l’horizonta- lité, car le pouvoir appar- tient à la multitude et aux réseaux qui se déploient entre les usagers ; de l’au- tre, celui de la verticalité, puisque l’entreprise qui sait le mieux se placer se re- trouve, en quelques années, dans une situation de quasi- monopole. Comment fonc- tionne Facebook ? Grâce à ses centaines de millions d’utilisateurs. Et dans le même temps, laisse-t-il une place pour un concurrent ? Quasi aucune. En parallèle, on constate que ce nouveau modèle est celui de la dis- ruption accélérée : innover en permanence, en continu, c’est le seul moyen de croî- tre, donc de survivre. Mais ce modèle crée aussi des fragilités : il génère des formes nouvelles d’emploi, différentes du salariat, qui le transforment, le com- plètent, parfois le rempla- cent. Cette transformation n’est pas limitée à un sec- teur, elle concerne toute notre économie et son or- ganisation en profondeur. Face à cela, notre respon- sabilité est d’accueillir ces transformations et de les permettre. il faut donner à chacun sa chance de saisir les nouvelles opportunités économiques. il faut ouvrir
Qu’est-ce que va vraiment apporter la réforme sur le travail dominical ? D’abord, elle va créer de l’activité. Aujourd’hui, les touristes qui se rendent à Paris ou Nice le dimanche trouvent les portes des ma- gasins fermées. Nous per- dons là un potentiel co- lossal ! C’est pourquoi la loi crée des zones touris- tiques internationales où il sera désormais possible de consommer le di- manche. C’est le cas des quartiers touristiques de Paris, ou ceux de villes côtières, comme Nice, Cannes ou Deauville. L’ou- verture concerna aussi les principales gares du pays,
draient payer des services conformément à ce qu’ils coûtent vraiment. Nous avons donc modernisé la fixation des tarifs des ad- ministrateurs judiciaires, des commissaires-priseurs, des greffiers des tribunaux de commerce, des huissiers de justice, des mandataires judiciaires et des notaires, parce qu’ils ne correspon- daient plus à la réalité des services rendus aux Fran- çais. Nous avons aussi ré- formé les règles d’instal- lation, car il n’est pas nor- mal qu’à diplôme égal et à compétences égales, cer- tains puissent exercer et d’autres non. A la fin des fins, c’est l’intérêt général que nous avons servi !
Comment réagissez- vous à l’invalidation
©ACOME
par le Conseil constitu- tionnel d’une mesure phare : le plafonnement des indemnités aux prud’hommes ? Commençons par le début. il y a bien une réforme des prud’hommes, qui est déjà entrée en vigueur : les délais sont raccourcis, la conciliation est favorisée et les juges sont mieux for- més. Ces mesures ont été validées par le Conseil constitutionnel. Ensuite, il faut être précis : ce que le Conseil constitutionnel a retoqué, c’est seulement le critère de taille des entre- prises. il a validé le prin- cipe du plafonnement des indemnités prud’homales, ainsi que le critère d’an- cienneté du salarié. Ma vo- lonté, c’est donc de trouver un dispositif acceptable
L'homme du changement, c’est maintenant
Jamais la France n’a connu un ministre de l’Economie aussi jeune. A 37 ans, Emmanuel Macron affiche un parcours à couper le souffle. Bouillonnant et surdoué dès l’adolescence, l’étudiant en philosophie – excellent pianiste – il fut l’assistant de Paul Ricœur durant deux années, avant d’intégrer l’ENA, dont il est diplômé en 2004. Emmanuel Macron intègre alors l’Inspection générale des Finances (IGF) et devient chargé de mission auprès du chef de service en 2007. Dans ce cadre, il a notamment été rapporteur de la Commission sur la libération de la croissance, présidée par Jacques Attali. Adepte des nouveaux challenges, celui qui affiche déjà une carrière très prometteuse travaille ensuite dans le secteur bancaire. Sans renier son engagement en politique, puisqu’il participe, dès 2011, à la campagne pour les primaires socialistes aux côtés de François Hollande. Il participe aussi à la campagne présidentielle, durant laquelle il est chargé de coordonner un groupe d’experts et d’élaborer le programme économique du candidat. A partir de mai 2012, il devient secrétaire général adjoint de la Présidence de la République, en charge du suivi de la stratégie, des affaires économiques, ainsi que de la supervision des sujets budgétaires, financiers, fiscaux et sectoriels. Il faudra attendre le 26 août 2014 pour que cet entrepreneur dans l’âme sorte enfin de l’ombre en étant nommé ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique au sein du gouvernement Valls. Le défi qu’il doit relever : relancer l’activité économique de la France ! Avec un premier baptême du feu réalisé avec succès, malgré les critiques émanant de son propre camp. A savoir l’adoption de la Loi Macron reflétant plus que jamais le dynamisme d’un jeune premier,
décidé à inscrire la France dans la réforme.
els
des secteurs dans lesqu. les barrières et les rigidités empêchent la création d’ac- tivité et d’emplois. Et donc légiférer, pour offrir les conditions de la réussite aux individus qui essaient et prennent des risques : ce sera tout l’enjeu de ce se- cond train de réformes.
Propos recueillis par Charles Cohen
30
OCTObRE 2015


































































































   28   29   30   31   32