Grande distribution : à quand une alimentation durable ?

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Ezzedine El Mestiri, fondateur du magazine Nouveau consommateur en 2003

En plus des contraintes économiques de son pouvoir d’achat, le consommateur est aussi obligé de subir la nature de l’offre et les stratégies de la grande distribution.

Les supermarchés sont incontournables. Nous y effectuons 70 % de nos achats alimentaires. Et 24 % de notre empreinte carbone provient de l’alimentation. Dans un récent rapport, le Réseau Action Climat (RAC), qui fédère une quarantaine d’associations vient d’analyser les actions menées par la grande distribution, en faveur du climat et d’une alimentation durable. Trois critères ont été appliqués pour évaluer ses efforts dans la transition alimentaire : la transparence, les actions et la promotion d’une alimentation durable.

Selon le RAC, le résultat est bien décevant. Aucune enseigne n’est à la hauteur de cet enjeu environnemental et la plupart d’entre elles se révèlent un frein à la transition alimentaire. Certains distributeurs s’en sortent mieux que d’autres, comme Carrefour, avec une note de 9/20, Leclerc est bon dernier avec un 5,8/20.

80 % des Français disent vouloir consommer plus « responsable ». Mais malheureusement, leur capacité à accéder à une alimentation saine reste dépendante de la grande distribution, un maillon essentiel pour déterminer les caractéristiques de l’offre alimentaire et nos choix de consommation !

L’État, quel pouvoir d’influence ?

L’étude montre que toutes les enseignes incitent à la surconsommation de viande et de produits laitiers, qui proviennent en immense majorité de modes de productions intensifs. Ainsi, 92 % des plats préparés contiennent de la viande ou du poisson, et moins de 10 % du poulet et du steak haché proposés en rayon sont bio. Ces multiples offres promotionnelles sur les produits d’origine animale pèsent lourdement dans l’empreinte carbone des Français. Et comme l’ont rappelé de nombreuses publications du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) la consommation de produits animaux a des conséquences directes et dramatiques sur l’environnement.

Le RAC adresse aux pouvoirs publics des préconisations qui visent à davantage encadrer la grande distribution pour accompagner les consommateurs dans la transition alimentaire. Parmi lesquelles, l’obligation d’un étiquetage des produits alimentaires qui indique les impacts environnementaux. Rendre aussi plus accessibles financièrement les produits issus de modèles agricoles durables, dont l’agriculture biologique et interdire la publicité et le marketing pour les produits à base de viande…

En effet, le pouvoir d’influence de l’État sur nos modes de consommation s’exerce principale­ment à travers la réglementation sur la publicité et le marketing pour les produits alimentaires. En renonçant à la contrôler, les pouvoirs publics laissent librement les industriels de l’agroalimentaire façonner nos préférences alimentaires, en particulier celles de nos enfants !

En Allemagne, sous la pression de l’association Foodwatch, Lidl a annoncé mettre fin à la publicité et au marketing qui cible les enfants pour ses marques. L’association vient de lancer une pétition pour exiger que les distributeurs français suivent l’exemple et s’engagent dans ce sens. Mettre un terme au marketing et la publicité pour la malbouffe ciblant les enfants !

En finir avec « le prix le plus bas » !

Le consommateur n’est pas pleinement souverain de ses choix alimentaires. En plus des contraintes économiques de son pouvoir d’achat, il est aussi obligé de subir la nature de l’offre et les stratégies de la grande distribution. Celle-ci, par exemple, procède rarement à une promotion d’une alimentation plus végétale. L’obsession des enseignes demeure le prix le plus bas ! Le message matraqué qui valorise que le juste prix est le prix le plus bas entraîne une dépréciation de la valeur de l’alimentation !

La transition vers une alimentation durable exige une transformation profonde des pratiques de tous les maillons de la chaîne : production agricole et agroa­limentaire, distribution et consommation. Il est donc urgent de faire évoluer notre sys­tème alimentaire.

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