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Entre 1971 et 2019, l’Arctique s’est réchauffé trois fois plus vite que la planète.
Le 19 mai, le plus gros iceberg qui existe – une surface de 4 320 km2 – se détache de l’Antarctique. Processus naturel ou réchauffement climatique ? un peu des deux. Cependant, ce que l’on observe au pôle opposé, en Arctique, n’a rien de naturel depuis plusieurs décennies. Un rapport du Programme de surveillance et d’évaluation de l’Arctique (PSEA), publié jeudi 20 mai, souligne que la région s’est réchauffée bien plus vite que la planète. La banquise, elle, pourrait disparaître d’ici à 2050. Derrière, des enjeux économiques et commerciaux majeurs…
« L’augmentation annuelle moyenne à la surface de l’Arctique (terre et océan) entre 1971 et 2019 a été trois fois plus élevée que l’augmentation de la moyenne mondiale pendant la même période », lancent les auteur·es du rapport PSEA. Une hausse d’un peu plus de trois degrés pendant que la Terre, elle, a subi un réchauffement d’un degré en cinquante ans.
Vers la disparition de la banquise ?
À titre d’illustration, sur le littoral russe le 20 mai, le thermomètre affichait 30 degrés. Contre 10 normalement en cette période. Les feux de forêts ont déjà commencé et se multiplient en Sibérie. Bref, l’Arctique chauffe. Et une telle accélération du réchauffement dans cette région du cercle polaire entraînerait une disparition de la banquise avant 2050. Les auteur·es le prédisent : avant cette date, ils·elles s’attendent à « un Arctique pour la première fois quasiment sans banquise en septembre ».
Pire, selon les projections, les températures moyennes en Arctique pourraient s’élever d’ici à la fin du siècle entre 3,3 et 10 degrés au-delà de leur moyenne observée sur la période 1985-2014. Une estimation assez large puisque le chiffre exact dépendra du volume des futures émissions de gaz à effet de serre. Sur cette situation en Arctique, huit pays se retrouvent concernés et devront coopérer pour mettre fin au scénario catastrophe. Ils forment le Conseil de l’Arctique : les États-Unis, la Russie, le Canada, l’Islande, le Danemark, la Suède, la Norvège et la Finlande.
Des forts enjeux économiques…
Jusqu’ici, les épaisses couches de glace empêchaient toute exploitation fossile ou minière, et même commerciale. Mais, vous l’aurez compris, le réchauffement climatique – et la fonte des glaces – change la donne. Le territoire fait et fera l’objet de plus en plus de convoitises. Pour certains pays, le réchauffement climatique rime avec nouvelles opportunités économiques. D’abord, une nouvelle route maritime relierait l’Asie à l’Europe, par le nord. Laquelle serait aussi bien plus rapide que le canal de Suez. D’ailleurs, cet hiver, un méthanier russe parvenait à traverser l’Arctique… ce qui ne signifie rien de bon pour le climat. La Russie, elle, pourrait à l’avenir se frotter les mains grâce à cette nouvelle voie navigable.
Le réchauffement climatique va aussi de pair avec un accès plus facile aux sous-sols de l’Arctique, qui détiendraient environ un quart des ressources mondiales en énergie. Déjà, la mer de Barents regorge de pétrole. L’Arctique contient aussi du gaz naturel et du gaz liquéfié. Et puis des minerais : de l’or, du nickel, du zinc ou de l’uranium.
… aux tensions diplomatiques ?
Qui dit enjeux économiques dit tensions diplomatiques. Chaque pays tente d’étendre sa zone où il peut exploiter les fonds sous-marins. La Russie a déjà avancé ses pions : « Ce sont nos terres, notre littoral [l’Arctique, ndlr]», prévenait le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov. Le pays de Poutine réenclenche ces dernières années d’anciennes bases soviétiques et déploie des systèmes de défense anti-aérien. Les États-Unis aussi rôdent, Trump avait d’ailleurs proposé d’acheter en 2019 le Groenland, terre riche en ressources précieuses.
De leur côté, les Chinois·es ne possèdent aucun territoire dans la zone mais entendent rouvrir des mines. En témoigne la tentative de Greenland Minerals, société australienne épaulée par un investisseur chinois, d’extraire des terres rares au Groenland. S’en sont suivies des élections anticipées avec la défaite des pro-mines. Bref, chaque État veut sa part du gâteau, un sommet a eu lieu en Islande les 19 et 20 mai entre les pays riverains de l’Arctique. Obsédés par les opportunités à venir, les pays concernés se doivent de ne pas oublier l’enjeu majeur de la région : le réchauffement climatique… L’Arctique abrite tout de même 20 000 espèces animales et végétales !
GW