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Si la meilleure solution pour une start-up reste la pépinière, d’autres possibilités existent avec divers avantages à la clé (services, accompagnement, tarifs préférentiels…). Tour d’horizon.

L’an dernier, 525000 entreprises ont été créées en France (chiffres Insee). Si vous faites partie de ces heureux créateurs, vous vous êtes nécessairement posé la question suivante : où vais-je bien pouvoir installer mon activité ? Parc immobilier privé, technopole, incubateur, pépinière, centre d’affaires, hôtel d’entreprises… Il est facile de se perdre dans la jungle des hébergements. Voici quelques clés pour mieux vous y retrouver.
Pour une jeune entreprise innovante, la meilleure solution est sans nul doute de se tourner vers les pépinières d’entreprises publiques ou parapubliques. Ces structures proposent des locaux et bureaux, meublés ou non. Le matériel et l’ensemble des services nécessaires au bon fonctionnement d’une start-up (salles de réunion, espace détente, imprimante, wifi, documentation, secrétariat mutualisé, accueil téléphonique, gestion du courrier…) y sont mis à disposition. Autre atout : la flexibilité. Une pépinière offre en effet la possibilité d’agrandir régulièrement sa surface de bureaux en fonction de l’essor du projet. De même, le préavis en cas de départ est généralement très court, beaucoup plus simple et souple qu’un traditionnel bail 3/6/9. Les pépinières proposent également un accompagnement régulier du créateur d’entreprise. « Nous assurons le suivi de l’évolution du business plan, la mise en place d’indicateurs précis et d’un tableau de bord, détaille Isabelle Corbin, directrice de Pays d’Aix développement. De plus, nous disposons d’un réseau d’experts que nous pouvons mobiliser en fonction des problématiques des porteurs de projet. »
Loyers allégés
La pépinière présente également un avantage de poids en matière de coût. Une partie des équipements étant mutualisée, l’entrepreneur peut se contenter de louer un petit bureau à un tarif généralement imbattable. « Chez nous, le calcul du loyer se fait en fonction du chiffre d’affaires de l’entreprise, du nombre de salariés, etc., précise Claire Langry, responsable communication et marketing de la Technopole de l’Aube. Cela signifie que quand l’entreprise n’est pas en mesure de dégager du CA, on ne la fait pas payer. » Autre exemple : sur l’agglomération lyonnaise, les tarifs des pépinières sont progressifs. Ils s’établissent à 50% du prix du marché la première année, 75% la deuxième année et 100% la troisième année. « L’accès à une pépinière est plus facile, comparé aux exigences des propriétaires privés, renchérit Isabelle Corbin. Dans le privé, on va souvent vous demander des dépôts de garantie, des cautions bancaires… Pour une entreprise en création qui ne gagne pas encore d’argent, ce n’est pas possible. »
En revanche, pour avoir son bureau au sein d’une pépinière, le créateur doit défendre son dossier devant un comité d’agrément qui jugera du caractère innovant du projet et/ou de sa capacité à créer des emplois à terme. Mais le jeu en vaut très certainement la chandelle. « A l’horizon de cinq ans, seulement quatre entreprises sur dix survivent, constate Florent Chante, responsable du service développement local et proximité au sein de la direction innovation et action économique du Grand Lyon. En pépinière, on dépasse les 80% grâce à l’accompagnement. » Une entreprise peut rester dans une pépinière pour une durée de deux à quatre ans.
Liste d’attente
Les entreprises œuvrant dans des domaines d’activité plus traditionnels et ne pouvant prétendre aux services et à l’accompagnement des pépinières publiques pourront se tourner vers des structures privées telles que les centres d’affaires, encore appelés hôtels d’entreprises. Ces structures ne dispensent pas l’accompagnement d’une pépinière mais mettent tout de même à disposition des services mutualisés. Dans la région d’Arras et en Île-de-France, la société informatique Décima a ouvert plusieurs pépinières privées de ce genre. Elle a notamment investi la citadelle Vauban d’Arras (classé Unesco) après le départ des militaires en 2010 pour en faire un Foyer numérique. Des bureaux privatifs de 12 à 60 mètres carrés y sont loués au tarif de 25 euros du mètre carré, sans charge supplémentaire. Et là, pas besoin de convaincre un comité d’agrément. « Nous sommes ouverts à toutes les entreprises à la condition qu’il ne s’agisse pas d’une activité bruyante, qu’il n’y ait pas de stockage ni d’utilisation d’êtres vivants ni de matières dangereuses », souligne Jérôme Décima, président du groupe éponyme. Le Foyer numérique accueille principalement des entreprises du secteur tertiaire (aide à domicile, informatique, e-commerce…). « Il y a peu de turnover, certaines entreprises sont là depuis le début. Nous sommes complets tout le temps et nous avons une liste d’attente. » L’offre du groupe Décima est sans engagement de durée. « Les gens peuvent partir quand ils veulent, au mois le mois, précise le dirigeant. Le fait qu’il n’y ait pas de frein au départ, ça change tout. »
Ecosystème
Une jeune entreprise innovante aura tout intérêt à s’insérer dans une technopole, car cela reste un environnement global où les entreprises de toutes tailles et de tous secteurs se croisent au quotidien. On y trouve généralement une offre propre à satisfaire les besoins de l’entreprise à chacun de ses stades de développement, de l’incubateur aux locaux de bureaux privés en passant par la pépinière et l’hôtel d’entreprises. La Technopole de l’Aube s’étend ainsi sur 40 hectares dédiés à l’innovation, dont 12500 mètres carrés d’immobilier à disposition des jeunes entreprises. « Être intégré à un tel écosystème est un réel atout, assure Claire Langry. Nous disposons d’un réseau de 420 experts bénévoles que nous sollicitons régulièrement en fonction des problématiques des porteurs de projet (financement, droit, ressources humaines, marketing…). Nous pouvons également mobiliser le club des business angels de Troyes dont le secrétaire est également directeur général délégué de la Technopole. »
« Notre rôle est de prendre un entrepreneur un peu seul et de le placer dans un environnement où nous allons le guider pas à pas, résume Christian Travier, directeur de Laval Mayenne technopole. Dans une ville comme Laval, il n’est pas difficile de trouver des locaux privés à un prix raisonnable. Si les gens viennent s’installer à la technopole, c’est pour ce que cet environnement peut leur apporter. Bien plus que des locaux ou des bureaux, nous leur apportons des contacts. » Laval Mayenne technopole organise en effet une cinquantaine d’événements par an (apéros, conférences, formations, petits déjeuners…) destinés à favoriser l’échange et la mise en réseaux entre les acteurs de la technopole. Début octobre, Laval Mayenne technopole a également inauguré la Licorne, un hôtel d’entreprises innovantes destiné à accueillir les start-up issues de la pépinière technologique de Laval ainsi que les entreprises innovantes françaises ou étrangères cherchant à s’installer dans des locaux modernes. Ce bâtiment flambant neuf de quatre étages dispose d’une surface de 1800 mètres carrés de bureaux modulables, des espaces communs et des salles de réunion.
Coworking
En amont de la pépinière et de l’hôtel d’entreprises, le porteur de projet peut faire ses premiers pas grâce au coworking, dont de nombreux espaces fleurissent un peu partout dans les grandes villes de France, et ce depuis une petite dizaine d’années. « Le premier niveau pour l’entrepreneur, c’est de travailler de chez lui, mais cet exercice a des limites : présence des enfants, absence de collègues, etc. », note Florent Chante. Un espace de coworking permet de se créer une ambiance studieuse à moindre frais, mais également de réseauter avec les autres membres. « En général, dans un espace de coworking, celui qui fait des sites Internet réalise les sites Internet de tout le monde », sourit Florent Chante.
En amont toujours, on trouve aussi l’incubateur d’entreprises. Celui-ci s’adresse à des structures en cours de création et propose également un ensemble de services adaptés à leurs besoins. Les incubateurs sont souvent associés à des établissements d’enseignement supérieur dont ils accueillent les étudiants et sont généralement spécialisés (biotechnologies, informatique, télécom…).
Conseils pratiques
Un certain type de projets pour ces structures
Ne pas trop attendre avant de se poser la question de l’hébergement de son entreprise. Voici le premier conseil simple que l’on pourrait donner à un jeune entrepreneur. « Isolé, le porteur de projet va vite s’épuiser, alors qu’au sein d’une pépinière il sera entouré, insiste Isabelle Corbin, directrice de Pays d’Aix développement. Par ailleurs, il existe de nombreuses aides à la création et à l’innovation, mais souvent les entrepreneurs vont les chercher trop tard, lorsqu’ils ont grignoté tout leur capital. Si le porteur de projet est bien accompagné, il a toutes les chances de faire moins d’erreurs. » Mais pour réussir à intégrer une bonne pépinière, il est important de ne pas traiter son dossier de candidature à la légère. « Outre la qualité du business plan et la pertinence du projet, la cohérence de l’équipe dirigeante est un élément essentiel, poursuit Isabelle Corbin. Un bon projet avec une mauvaise équipe ou juste une personne seule a toutes les chances de ne pas passer. » D’une manière générale, ne perdez pas votre temps à frapper à la porte d’une technopole ou d’une pépinière d’entreprises innovantes si votre projet entrepreneurial ne présente pas une forte valeur ajoutée technologique. « Ce genre d’hébergement n’est pas adapté à un graphiste freelance ou quelqu’un qui lance un simple site d’e-commerce, souligne Claire Langry, responsable communication et marketing de la Technopole de l’Aube. Nous recevons souvent ce genre de sollicitations et nous les renvoyons vers la CCI. »
Yann Petiteaux