Reconfinement, le casse-tête français

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À l’aube d’un (très) probable troisième confinement, les craintes des entreprises quant au maintien de leur activité refont surface.

Rebelote, pour la troisième fois, la France se dirige vers un confinement. Si les scientifiques poussent en ce sens, le gouvernement se laisse le temps de la réflexion. Et anticipe une difficile acceptation de la mesure. Les entreprises, elles, redoutent un nouveau coup d’arrêt brutal et militent pour que tous les commerces restent ouverts.

De jour en jour, le scénario d’un troisième confinement paraît toujours plus inéluctable. Les scientifiques, Conseil éponyme en tête, se positionnent pour cette mesure, devenue la plus souhaitable au vu de la dynamique pandémique et des nouveaux variants. Mais le gouvernement a décidé cette fois de jouer la montre et d’attendre de nouvelles données. Olivier Véran, parti pour devenir le ministre de la Santé le plus connu de la Ve République, souhaite mesurer les effets du couvre-feu généralisé à 18 heures avant de prendre le cap du reconfinement. « Si ça ne baisse pas, si les variants commencent à se diffuser partout, alors on prendra des mesures supplémentaires évidemment. Et ça s’appelle le confinement », a-t-il expliqué le samedi 23 janvier. Si les nombres de cas de covid quotidiens sont très inférieurs à ceux observés en octobre (50 000), la situation épidémiologique ne s’améliore pas : avant le déconfinement du 15 décembre, on enregistrait 11 400 cas par jour, la moyenne dépasse aujourd’hui les 20 000 cas quotidiens. Idem pour les admissions à l’hôpital qui ne baissent pas (1 375 durant la semaine du 11 janvier). À propos du variant britannique de la covid, réputé 50 % plus contagieux et potentiellement plus létal, le président du Conseil scientifique Jean-François Delfraissy, parle d’une « deuxième pandémie ». Rien que ça. Une situation qui fait dire à l’infectiologue très (trop ?) médiatisée Karine Lacombe que « le confinement apparaît vraiment irrémédiable, la question qui se pose maintenant, c’est le délai ».

Le défi du maintien de l’activité
Si le Premier ministre Jean Castex a ouvert jeudi 21 janvier une session de dix jours de rencontres avec les dirigeant·es syndicaux·les et patronaux·les, ce n’est pas pour rien. Ce sommet avec les partenaires sociaux pourrait bien annoncer le prochain confinement et préparer les mesures d’accompagnement qui en découleront. Le président de la CPME, François Asselin, reçu en premier, a notamment plaidé la consolidation des dettes des PME assortie d’un échéancier de remboursement de long terme, pendant que Medef, U2P et consorts se positionnent pour le maintien des aides. Un sujet on ne peut plus d’actualité, un reconfinement coûterait à nouveau très cher à l’État. Selon Laurent Saint-Martin, rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, le couvre-feu à 18 heures coûte environ 10 milliards d’euros chaque mois à l’État, et les aides aux entreprises 6 à 7 milliards d’euros. Sans compter le manque à gagner pour l’État, qui se creuserait d’autant plus si des entreprises ferment.

Le maintien de l’activité, c’est en ce sens que les représentant·es syndicaux·les et patronaux·les poussent. Le Medef notamment fait pression pour que le reconfinement ralentisse le moins possible l’activité économique, à l’instar de son dirigeant Geoffroy Roux de Bézieux, qui affirme qu’il faut que « ce confinement possible ne soit pas un désastre supplémentaire pour une économie qui est déjà très mal en point ». Selon M. Medef, les expériences passées de ces derniers mois ont montré que les commerces pouvaient « rester ouverts sans provoquer de contamination ». C’est pourquoi l’organisation patronale s’est positionnée pour le maintien de l’ouverture de « tous les commerces » et la fin du « débat absurde » entre commerces essentiels et non-essentiels.

Le défi de l’acceptabilité sociale
Outre les dialogues et négociations avec les entreprises et leurs représentant·es, le gouvernement se retrouve également face à un autre casse-tête : celui de l’acceptation d’un reconfinement par les Français·es. Quelques semaines seulement après le lancement de la campagne de vaccination et dans un contexte de couvre-feu et de télétravail généralisé, le confinement apparaît moins « acceptable ».  Si le gouvernement et le ministère de la Santé expliquent attendre les chiffres pour prendre leur décision, il apparaît surtout qu’il s’agit de trouver les bons compromis et le bon timing pour faire passer la pilule au mieux, auprès des entreprises comme auprès du grand public. Entre confinement limité aux week-ends, ouverture des commerces à horaires limités et restrictions des déplacements, les idées de l’exécutif ne manquent pas. Il faudra faire comprendre la nécessité d’un confinement préventif, même si l’épidémie n’apparaît pas plus incontrôlée aujourd’hui qu’hier. L’enjeu de l’acceptabilité ne saurait être pris à la légère, en témoignent les mouvements de révolte qui ont éclaté aux Pays-Bas ces derniers jours pour protester contre les mesures restrictives. Dans l’entourage d’Olivier Véran, on concède que « le gouvernement doit prendre la mesure d’un confinement au moment où l’opinion peut l’accepter. Pas avant ». Attention à ne pas trop attendre cependant, au risque de le regretter. « Si nous continuons sans rien faire de plus, nous allons nous retrouver dans une situation extrêmement difficile, comme les autres pays, dès la mi-mars », prévient Jean-François Delfraissy.

Adam Belghiti Alaoui

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