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« La hausse des prix de l’énergie met en suspens les trajectoires de décarbonation »
La transition énergétique et climatique est l’affaire de toutes et tous. Et, plus encore, celle des entreprises, premiers pollueurs et acteurs décisifs pour une nouvelle donne écologique. Si les entreprises ont enregistré l’impératif de transition, la conjoncture et l’instabilité des marchés de l’énergie font du coût de cette transition une variable imprévisible et dommageable. À cet égard, dans une tribune pour le journal Le Monde, Yann Leriche, directeur général de Getlink (anciennement Eurotunnel), appelle la Commission européenne à fixer une trajectoire du prix du carbone.
Parmi les conséquences imprévisibles de la crise de la covid et, surtout, de l’après-crise et du rebond des économies, la hausse majuscule des prix de l’énergie en général et de l’électricité en particulier met en danger la transition énergétique des grands groupes. En réaction à cette conjoncture, les trajectoires de décarbonation des entreprises, et donc de l’économie, sont pour beaucoup mises en suspens. De quoi établir un constat, évident bien que trop souvent ignoré, la transition énergétique a un coût important pour les entreprises. Si ce coût pénalise les activités, difficile d’assurer la dite transition. Comme le rappelle Yann Leriche : « La transition nécessite de passer d’une énergie bon marché à une énergie plus coûteuse, elle n’est donc pas une source immédiate de profit pour l’entreprise. » Pour éviter les mauvaises surprises, l’auteur de la tribune avance la solution d’une tarification du carbone encadrée à l’échelle européenne, avec une trajectoire et des prix fixés par la Commission européenne. De quoi limiter les incertitudes et inciter les entreprises à maintenir leurs dynamiques de transition malgré la crise et les coûts ? Si oui, banco. ABA
Face au dérèglement climatique, la grande majorité des acteurs économiques ont aujourd’hui compris l’impérative nécessité de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Pourtant, la forte augmentation des prix de l’énergie que nous observons ces derniers mois, et en particulier de l’électricité, nous place face à une autre réalité.
Cette hausse des prix met en suspens les trajectoires de décarbonation. Ainsi, la compagnie britannique de fret Freightliner ressort ses locomotives diesel. Le groupe sidérurgique allemand Saarstahl, qui a acquis une aciérie électrique en France, a envisagé de rapatrier temporairement sa production vers des unités alimentées au charbon, provoquant une levée de boucliers des pouvoirs publics français.
La fédération des producteurs d’acier britannique s’avoue incapable d’adopter des techniques bas carbone face à une telle pression sur les prix de l’énergie. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) prédit des niveaux records de consommation de charbon pour produire de l’électricité en 2021. Et les exemples sont nombreux.
Le coût de la transition énergétique
On pourrait vouloir se rassurer en énumérant les circonstances particulières qui expliquent l’état actuel des marchés de l’énergie. Mais ne nous faisons pas d’illusion sur notre futur : rien ne promet qu’il sera fondé sur la stabilité. Et surtout, acceptons la réalité que nous rappelle ce moment que beaucoup d’observateurs voudraient omettre ou masquer : la transition énergétique, et donc la transition écologique, a un coût.La transition nécessite de passer d’une énergie bon marché à une énergie plus coûteuse, elle n’est donc pas une source immédiate de profit pour l’entreprise. Pour permettre une transition rapide malgré cette donnée fondamentale, les outils sont connus : incitations à l’innovation verte et tarification du carbone. Le potentiel de la tarification pour annuler au plus tôt la compétitivité des énergies et des solutions les plus carbonées est puissant.
La hausse du prix du carbone induit mécaniquement une diminution durable des émissions de gaz à effet de serre (« The unequal economic consequences of carbon pricing », Diego Kanzig, London Business School, janvier 2022). Il faut fixer le prix du carbone au bon niveau pour favoriser une trajectoire de décarbonation des activités émettrices la plus efficace et la plus juste possible.
Pour la création d’un référent européen
Ce qui nécessite par définition une convergence des prix retenus par les différents acteurs vers la valeur qui doit servir de référence pour sélectionner les actions de lutte contre le dérèglement climatique.(…)