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Jacques Le Goff est professeur émérite en droit public et revient dans Ouest-France sur l’ubérisation du travail.
Lutter contre les faux·sses indépendant·es. En décembre, la Commission européenne amorce un basculement en demandant aux travailleur·ses des plates-formes d’être présumé·es salarié·es. Ce n’est encore qu’un projet de la Commission européenne, il doit encore passer par le Conseil et le Parlement européens. Serait considéré·e comme travailleur·se salarié·e celui ou celle qui réunirait au moins deux de ces conditions : la rémunération fixée via l’application, le contrôle à distance, des restrictions sur la liberté des horaires et le refus des tâches, le port d’un uniforme et l’interdiction de travailler pour d’autres.
Au total, les plates-formes présentes dans l’Union européenne – environ 500 – emploient près de 28 millions de travailleurs, dont « 5 millions seraient de faux indépendants ». Bref, les plates-formes ont tout à gagner à faire passer des travailleur·ses pour des indépendant·es alors qu’ils·elles cochent un certain nombre de critères propres au salariat. De façon à ne pas supporter les protections offertes par le Code du Travail, les conventions collectives etc. Sans compter que ces travailleur·ses souffrent le plus souvent d’une grande précarité. Car sur les 28 millions de personnes que les plates-formes emploient dans l’Union européenne, plus de la moitié gagne moins que le Smic… GW
De faux·sses indépendant·es, de quoi s’agit-il ?
D’un mode de gestion de la main-d’œuvre consistant à escamoter la réalité des statuts et faire passer des salariés pour des travailleurs indépendants. Il y a une réalité : la subordination de fait, et une apparence : l’autonomie, avec un évident avantage pour le donneur d’ouvrage puisqu’il emploie des gens comme s’ils étaient salariés mais sans avoir à supporter les protections offertes par le Code du travail, les conventions collectives, ni les cotisations sociales Urssaf. Un exercice d’illusionniste.Le phénomène n’est pas nouveau. On l’avait vu prendre dans les années 1970-1980 des dimensions presque alarmantes dans les secteurs du bâtiment, des transports et déjà des taxis avant que la Cour de cassation n’y mette un ferme coup d’arrêt en 1985.
Le développement des plates-formes de service l’a requinqué. Sur les 28 millions de personnes qu’elles emploient dans l’Union européenne – 43 millions annoncées pour 2025 – plus de la moitié gagne moins que le Smic et 5,5 millions d’entre elles seraient des faux artisans dont plusieurs centaines ont saisi les tribunaux avec succès en obtenant la requalification de leur statut en contrat de travail.
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