Temps de lecture estimé : 3 minutes
« Le numérique est l’enjeu décisif. Et les États membres partagent ce point de vue. Les dépenses au titre du volet numérique de NextGenerationEU dépasseront même l’objectif de 20 % », affirmait le 15 septembre la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen. Ce même jour, l’institution présentait une proposition de plan pour assurer la transformation numérique des pays membres et moderniser l’économie européenne d’ici à 2030.
Le numérique est une ressource clé pour demain. La part du numérique dans le plan de relance, actuellement de 750 milliards d’euros, pourrait passer de 20 à 30 % expliquait fin septembre Thierry Breton, commissaire européen du marché intérieur. La proposition prévoit un vaste programme d’actions et des trains de mesures réglementaires dans les prochains mois. Et pour la première fois, elle suggère un cadre de gouvernance du numérique, mais aussi des moyens qui seront mis en œuvre pour atteindre quatre objectifs prioritaires décrits dans « la boussole numérique 2030 ». Les compétences numériques, les infrastructures numériques, les entreprises numériques et les services publics numériques sont les quatre points cardinaux qui impacteront l’ensemble des acteurs européens. Autre élément majeur : le suivi des principes sera approuvé dans une déclaration interinstitutionnelle et un mécanisme permettra d’organiser avec les États des projets multinationaux.
Que va changer ce plan pour les entreprises ?
Les premiers domaines clés de coopération entre les États européens ont été identifiés et définis par la Commission. Les PME sont doublement concernées. Elles sont les plus touchées par le plan et ce sont elles qui vont développer et fournir les nouveaux produits et services.
Pour la Commission, la réalisation d’infrastructures et de services de données européens communs sont prioritaires. Ces derniers vont permettre la mutualisation des ressources. Actuellement, 90 % des données de l’UE sont gérées par des entreprises américaines, moins de 4 % des principales plates-formes en ligne sont européennes. Du côté des puces électroniques européennes, elles représentent moins de 10 % du marché européen.
L’Europe entend donc accélérer le déploiement et l’utilisation de capacités numériques, tout en s’assurant de son approvisionnement numérique. Des innovations prometteuses devraient émerger, à l’image de start-up comme Grow Your Own Cloud qui offre des solutions nouvelles avec des méthodes de stockage des données au sein des végétaux.
Produire des technologies numériques responsables souveraines
Le travail sur de nouvelles générations de processeurs à basse consommation figure également dans les domaines prioritaires. Il s’agit d’encourager l’adoption de technologies et de produits numériques responsables qui abaissent l’empreinte environnementale. Et tout en optimisant l’utilisation des matériaux. L’ambition vise aussi à diminuer à la fois les coûts des intrants dans les processus de production et la vulnérabilité aux chocs d’approvisionnement. Là encore, de nombreuses innovations comme celles menées par European Processor Initiative devraient se multiplier. L’enjeu est de reprendre la main pour maîtriser ces technologies qui sont utilisées dans tous les appareils électroniques et dans tous les secteurs.
La 5G pour rayonner
Le déploiement paneuropéen de la 5G pour amener le très haut débit partout constitue également un axe majeur. Cette infrastructure numérique ouvrira de nouvelles fonctions et des possibilités de communication numérique sur les réseaux. Comme les médias holographiques de haute précision ou les expériences sensorielles numériques… La 5G permettra aussi des infrastructures de données dédiées pour les applications de l’informatique en nuage et du traitement des données avec des applications multiples et partagées dans la santé ou l’éducation. Entre autres.
D’un point de vue écologique, le passage aux réseaux 5G n’est pas neutre. Il réduirait la consommation d’énergie de 90 % et de 5,2 millions de tonnes de CO2 si 40 % des actif·ves passaient en télétravail deux jours par semaine.
À l’échelle de la France, le déploiement pourrait générer 20 000 nouveaux emplois à horizon 2025, doper les usages dans l’agriculture, les villes, l’industrie… Il pourrait ainsi atteindre une taille de marché de 15 milliards d’euros tout en renforçant l’excellence scientifique et la visibilité internationale.
Rattraper le retard sur le quantique
Une autre priorité se situe dans l’acquisition de supercalculateurs et d’ordinateurs quantiques raccordés avec l’entreprise commune EuroHPC. Les États membres et les pays associés qui ont choisi de devenir membres de l’entreprise commune et membres privés : la Plate-forme technologique européenne pour le calcul haute performance (ETP4HPC) et les associations Big Data Value (BDVA).
Ces technologies pourront accélérer les avancées dans la santé, les prévisions météorologiques, la finance ou l’assurance… mais aussi doper l’acquisition de compétences quantiques et la mise en place de coopérations stratégiques. La communication quantique sécurisée pourra améliorer la sécurité et le stockage d’actifs ou de données immatérielles, mais aussi renforcer les infrastructures stratégiques. Ces technologies permettront également, avec des IA, de détecter de manière préventive des cyberattaques et de mettre en oeuvre des actions prédictives et proactives pour réagir face aux risques.
La blockchain comme infrastructure sécurisée et écologique
Une infrastructure européenne de service de chaînes de blocs ou blockchain a déjà été mise en place depuis 2020 avec la Commission européenne et European Blockchain Partnership. Elle offre un service aux citoyen·nes pour gérer leur identité et réaliser des contrôles numériques, de diplôme par exemple. Il s’agit de déployer une technologie de blockchain sécurisée et écologique pour fournir aux entreprises des services transfrontières qui évitent des charges administratives et favorisent l’émergence de nouveaux modèles économiques. Dans le prolongement, la création d’une administration publique connectée est proposée. Elle viendrait en complément du cadre eIDAS et générerait une identité numérique européenne pour accéder à de nombreux services (ouverture de compte ou de droits liés, prise de rendez-vous…).
La Commission propose également d’établir un système « une fois pour toutes » à travers lequel les administrations publiques aux échelles locale, régionale et nationale échangeraient des données et des preuves par-delà les frontières.
Renforcer les pôles d’innovations européens et la formation
Pour accompagner la numérisation des entreprises et l’industrie, des « pôles d’innovations numériques européens » vont se voir renforcés. « Ce sont des guichets uniques conçus pour offrir aux PME une expertise technique et des possibilités de tester avant d’investir », affirme la Commission européenne. Des conseiller·ères financier·ères, des formations ou encore des expert·es seront accessibles pour accompagner des start-up et PME dans les innovations.
Enfin, la formation est au cœur des priorités. La Commission propose un partenariat multipartite à grande échelle avec des investissements publics et privés pour accroître à la fois la quantité et la qualité de l’offre d’enseignement et de formation. Il s’agit également de rendre attractifs les établissements et le territoire de l’UE pour attirer les talents et doper le marché de l’emploi. Les edtechs et start-up productrices de contenus et de technologies éducatives ont un donc un bel avenir devant elles.