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« Être surdoué est une richesse. Mais c’est aussi une différence qui peut susciter un sentiment de décalage, une impression de ne jamais être vraiment à sa place », écrit la psychologue et auteure Jeanne Siaud-Facchin dans son livre Trop intelligent pour être heureux ? Alors comment ces hauts potentiels intellectuels – que nous préférons à surdoués – vivent-ils leur quotidien en entreprise, sorte de microsociété ? Allergiques aux codes et aux normes – souvent très présents dans le monde du travail – ces individus représentent avant tout une grande richesse pour nos entreprises.

Vendredi soir, 19 h 15, dans une grande banque en petite couronne parisienne. À en croire son contrat de travail, Renaud y est graphiste – du moins c’est pour ce motif que le jeune homme a été embauché il y a deux ans « pour 35 heures hebdomadaires ». En pratique, Renaud – au-delà de son rôle stricto sensu de graphiste – apporte sa pierre à l’édifice lorsqu’il s’agit d’évoquer le plan global de communication de la maison, regarde et compare les stratégies des concurrents et donne son avis sur l’utilisation marketing des réseaux sociaux. Quand il ne cherche pas à raviver le collectif, à coups de propositions de jeux plus ou moins loufoques. Un vrai couteau suisse, toujours en ébullition et avide de sens au travail. Jamais il ne se présentera comme graphiste, toujours travaillant pour la banque X.

Passer d’une mission à l’autre
C’est cette pensée en arborescence, cette vision globale plutôt qu’une décomposition par tâches, qui caractérise les hauts potentiels. Lesquels « ont cette capacité à passer rapidement d’une mission à une autre, à exercer plusieurs métiers en même temps », remarque Ingrid Bianchi, une des fondatrices du think tank « Out of the box » dédié aux multipotentiels. De sorte à rompre l’ennui. Les hauts potentiels détestent la routine, le fonctionnement linéaire en entreprise, dans la mesure où ce sont des gens souvent « très engagés et passionnés, ce n’est pas rare de les voir cumuler une activité pour une association à côté de leur job principal », constate Ingrid Bianchi.

Souvent à la barque de parcours atypiques, avec des expériences variées, ces profils à haut potentiel dopent la créativité et l’innovation au sein d’une entreprise. Les hauts potentiels peuvent faire du bien aux grands groupes. Des structures souvent connues pour leurs stratégies bien ancrées, moins sur leur faculté à se remettre en question, « les hauts potentiels, adeptes du pourquoi, s’interrogeront toujours sur la finalité d’une action, pourquoi vous faîtes ceci ?, illustre la spécialiste Ingrid Bianchi, bref ils ont cette tendance à chercher la petite bête ». De quoi dépoussiérer les « petites habitudes » d’une entreprise. Ce qui compte avant tout pour les hauts potentiels : le sens qu’ils donnent à leur travail ! L’épanouissement prime sur la rémunération – jusqu’à un certain point bien entendu : « Un haut potentiel est tout à fait capable d’abandonner un poste grassement rémunéré s’il ne trouve plus de sens à ce qu’il fait… et pourquoi pas en accepter un autre, moins bien payé mais davantage stimulant ! », défend Bianchi.

Comment l’encadrer ?
D’abord le repérer. Pas facile puisque les hauts potentiels eux-mêmes ne sont parfois pas au fait de leurs spécificités. Tout haut potentiel déclaré comme tel a procédé à une évaluation de quotient intellectuel. Mais les signes cités plus haut (comme le côté slasheur ou passionné) peuvent mettre la puce à l’oreille. Ensuite, « tâche au manager de faire ressortir le meilleur de chacun·e de ses collaborateur·rices, et les hauts potentiels ne font pas exception », explique Ingrid Bianchi. Si le haut potentiel aime sortir du cadre normatif, laissez-lui une grande part d’autonomie, fixez des objectifs à plus long terme et peu importe la manière d’y parvenir. Accordez-lui une liberté de s’exprimer afin ne pas brider la prise d’initiative et donc la créativité – quitte à ce que son côté disruptif émerge – « trop le cadrer sera contreproductif », prévient Bianchi qui, d’autre part, dirige le cabinet spécialisé en ressources humaines Diversity Source Manager.

À vrai dire, la crise covid -19, via le télétravail qui en découle, a révélé certains hauts potentiels… de vrais poissons dans l’eau dans ce monde d’incertitudes, d’adaptation permanente et d’autonomie. En réalité, « je crois que les hauts potentiels se plaisent dans un mode hybride, et non seulement full télétravail, pour casser cette routine d’être toujours chez soi, les hauts potentiels ne sont pas tous des introvertis ! », conclue Ingrid Bianchi. Entreprises, qui ne jurent que par l’innovation à longueur de présentations PowerPoint, faîtes plus que jamais une place aux travailleur·es atypiques, les hauts potentiels en font partie.

 

Geoffrey Wetzel

 

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