Temps de lecture estimé : 2 minutes
Patrick Sadoun est le président-fondateur du Rassemblement pour une approche des autismes humaniste et plurielle (RAAHP). Il revient pour Marianne sur le débat autour de l’école inclusive.
Le 14 janvier, Eric Zemmour, candidat à la présidentielle de 2022, crée la polémique lorsqu’il questionne l’école inclusive. Les médias et réseaux sociaux s’enflamment : critiquer l’école inclusive, c’est aussi stigmatiser le handicap. Dans une tribune adressée au journal Marianne, Patrick Sadoun, président-fondateur du RAAHP, nous démontre que nous avons tort de raisonner ainsi. Surtout, il faut apprendre des gens de terrain.
Critiquer l’école inclusive. En voilà une idée. Et pourtant. Cette mesure adoptée sous la présidence Chirac permet aux enfants qui souffrent de handicap de suivre une scolarité dans le circuit classique. Pour le ministère de l’Éducation nationale : « L’école inclusive vise à assurer une scolarisation de qualité pour tous les élèves de la maternelle au lycée par la prise en compte de leurs singularités et de leurs besoins éducatifs particuliers. » Sur le papier rien ne cloche. Mais derrière la mesure humaniste se cache un tout autre tableau. Un manque d’accompagnement d’abord, avec un nombre d’AVS (auxiliaire de vie scolaire) et d’AESH (accompagnant des élèves en situation de handicap) insuffisant. Quant à leur formation, elle est parfois légère, voire inexistante. Ce n’est donc pas l’inclusivité qui est remise en cause, mais le cadre légal, réglementaire, ou même interne aux établissements, qui doit être critiqué. Certains handicaps nécessitent une attention de tous les instants. Un engagement et une méthode. Et l’Éducation nationale telle qu’elle existe aujourd’hui n’est pas toujours en mesure de l’apporter. Qu’ils s’agissent des professeur·es, des assistant·es de vie scolaire ou des directeur·rices… En face, les parents n’ont parfois pas d’autres solutions. Puisque les places en instituts médico-éducatifs (IME) sont chères car insuffisantes. Éric Zemmour n’a pas le monopole de ce débat, qui concerne l’ensemble des Français·es. MS
L’autisme, et le handicap en général, n’a jamais été un thème de campagne électorale. Douze millions de personnes sont concernées mais jusque-là, cela ne suffisait pas pour intéresser les candidats. Et puis brusquement, miracle, depuis quelques jours, tous en parlent et semblent se passionner pour cette question. Reconnaissons-le, on doit cet engouement soudain à Éric Zemmour, à son talent incomparable pour mettre les pieds dans le plat et poser sur la table les sujets qui fâchent, ceux qu’on a l’habitude de cacher sous le tapis.
Alors que le mot « inclusion » était absent des recommandations de la HAS [Haute autorité de santé] de 2012 pour les enfants et adolescents autistes, c’est devenu, en peu d’années, le maître mot de la politique du handicap et même de la politique tout court.
Apprendre que son enfant est handicapé est un traumatisme très violent qu’on met longtemps à surmonter. Mon fils autiste a 33 ans et il m’arrive encore de rêver qu’il parle et se comporte normalement, qu’on s’est trompé, qu’il n’est pas autiste et que tout va bien. Quand je croise des jeunes de son âge qui sont en couple, s’embrassent, se sourient, cela me fait parfois encore mal de penser qu’il ne connaîtra pas ce bonheur tout simple.
Alors je comprends parfaitement que tous les parents de jeunes enfants handicapés tiennent absolument à ce que leur enfant aille à l’école ordinaire, qu’il suive la même voie que les autres enfants et qu’il ait la même vie. Et souvent ça marche, c’est bien plus difficile que pour les autres enfants mais beaucoup (en particulier les autistes Asperger et ceux qui souffrent d’un handicap corporel ou psychique) parviennent à supporter les contraintes de la classe et à étudier. Pour eux, la loi de 2005, qui a fait de la scolarité en milieu ordinaire un droit opposable, a été une chance inestimable.