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« Il y a bel et bien en France un problème de gouvernance locale de la transition écologique »
L’urgence climatique est le défi du siècle. L’enjeu majeur des sociétés industrialisées. Pour mener à bien les grandes manœuvres publiques et collectives pour la préservation de l’environnement, la transition écologique commence sur le plan local. Problème, en France la machine de l’aménagement des territoires semble bloquée ou a minima ralentie. Un constat posé dans une tribune pour le journal Le Monde, par l’économiste et urbaniste Marie Defay, le professeur d’économie urbaine de l’Essec Édouard Dequeker et le directeur de Leonard, plate-forme de prospective du groupe Vinci, Julien Villalongue.
Au premier rang de la lutte pour la transition écologique, les collectivités territoriales ont un rôle décisif à jouer. Un rôle incontournable. Malgré les mesures de bon sens engagées un peu partout sur le territoire (nouvelles mobilités, végétalisation de certains espaces, énergies renouvelables…), les trois auteurs de la tribune l’affirment : l’échelle et le rythme de cette transition sont très insuffisants. On pourrait penser que le problème est d’ordre financier et technique, que par manque de moyens les collectivités ne peuvent satisfaire aux exigences climatiques et écologiques. Que nenni. Selon une étude de l’Essec en partenariat avec Leonard, les véritables blocages sont avant tout organisationnels et socio-culturels. Autrement dit, il faut opérer une révolution de la culture administrative française et offrir une plus grande souplesse d’aménagement aux collectivités. Aussi, la complexité du découpage administratif et du partage de portefeuilles entre élus locaux ralentit les processus. La meilleure gouvernance locale de la transition écologique passera également par une plus importante transversalité de l’action publique locale. ABA
Tribune. La transition écologique est, de loin, le plus grand défi posé à notre génération, et les collectivités territoriales sont en première ligne dans cette lutte. L’urgence à agir est grande, et les mandatures qui se sont ouvertes lors des dernières élections municipales et régionales seront décisives. La sensibilité à ces enjeux environnementaux continue incontestablement à se développer au sein du monde politique et de la société dans son ensemble.
Et pourtant, la nécessaire transformation des territoires est balbutiante. Si l’on voit se multiplier des pistes cyclables, des initiatives souvent réussies de végétalisation ou de piétonnisation, l’échelle et le rythme du changement sont très loin d’être suffisants. Alors, que se passe-t-il ? Manquons-nous, comme on pourrait le croire, de solutions techniques pour apporter des réponses concrètes aux enjeux des villes et territoires ? La question est-elle uniquement financière ?
En réalité, pas du tout. Une étude conduite par la chaire d’économie urbaine de l’Essec, en partenariat avec Leonard, montre que les vrais blocages sont en fait plus profonds. Essentiellement organisationnels et socio-culturels, ils se situent au cœur même de l’organisation territoriale française et dans la persistance de pratiques trop rigides en matière d’aménagement. Notre étude montre que, sans une mutation vigoureuse dans ces pratiques, aucune transition écologique ne pourra véritablement s’opérer.
Une complexité et une diversité exceptionnelles
Nous le voyons quotidiennement : les territoires font face à des enjeux d’une complexité et d’une diversité exceptionnelles, de l’impact carbone à la biodiversité, en passant par la gestion des ressources naturelles, l’équité socio-spatiale, la qualité du cadre de vie, ou encore la gestion des événements météo extrêmes…
Or, ce que l’on constate, c’est que, reposant sur des ingénieries parfois importantes mais trop peu agiles et travaillant trop souvent « en silos », les services techniques des collectivités ne sont la plupart du temps pas en mesure de piloter de véritables programmes de transition écologique.
Ce manque de transversalité de l’action publique locale est également dû à l’organisation politique des collectivités, et à un système de partage de portefeuilles entre élus qui demeure inefficace au vu des actions à mener. Il y a bel et bien en France un problème de gouvernance locale de la transition écologique.