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Que ce soit avant ou après redistribution, la France affiche des inégalités de revenus inférieures à la médiane européenne.
Vif débat. Source de controverses. Les inégalités de revenus divisent les économistes, que ce soit sur leur niveau – plus ou moins – acceptable, ou sur la façon dont il faudrait les réduire. L’économiste Thomas Piketty en a même fait son cheval de bataille, à travers des ouvrages comme L’économie des inégalités (1997) ou Le capital au XXIe siècle (2013). Mercredi 2 décembre, une étude publiée par France Stratégie a voulu clarifier l’ampleur des inégalités de revenus en France en comparaison avec d’autres pays européens. Résultat, la France ne s’en sortirait pas si mal, avant ou après redistribution…
« Notre objectif, c’est de clarifier ce débat, de situer le niveau des inégalités en France par rapport aux autres pays, et de voir parmi ces inégalités ce qui vient des inégalités primaires (inégalités de revenus avant redistribution) et ce qui vient de la redistribution », explique d’emblée Gautier Maigne, directeur du département société et politiques sociales chez France Stratégie. Avec quelques imperfections tout de même, l’étude ne porte uniquement sur les données de 2017 et ne peut donc prendre en compte les effets de la crise sanitaire sur les inégalités. Mais enfin, tout de même utile pour prendre la température. Il en ressort que la France affiche des inégalités de revenus parmi les plus faibles comparativement à nos voisins européens, avant même la redistribution, soit avant impôts et prestations sociales.
Des inégalités primaires inférieures de 2 % à la médiane européenne
D’après France Stratégie, organisme rattaché à Matignon, la volonté de redistribuer beaucoup découle – en France – d’un « choix politique » et non d’une situation d’inégalités extrêmes à la racine. Les données publiées montrent que notre pays enregistre un niveau d’inégalités primaires inférieur de 2 % à la médiane européenne et à celui de 19 des 29 autres pays européens étudiés (hors Allemagne, pas d’analyse). Pour ce faire, France Stratégie a eu recours à l’indice de Gini, un indicateur qui varie de 0 à 1 (0, une situation d’égalité parfaite et 1 d’inégalité absolue).
La France se distingue par rapport à nombre de pays européens. Notamment le Royaume-Uni, le cancre des pays retenus par France Stratégie puisqu’il enregistre des inégalités primaires supérieures de… 14 % par rapport à la médiane européenne ! Et la redistribution ne permet de réduire que de manière médiane les inégalités. En Espagne, les inégalités primaires se révèlent supérieures de 7 % par rapport à la médiane européenne et le pays a tendance à diminuer moins qu’ailleurs les inégalités via la redistribution. En revanche, la Pologne apparaît comme l’un des pays où les inégalités primaires sont les moins élevées, inférieures de 12 % à la médiane européenne, même si après, la logique de redistribution s’avère peu efficace.
Peut mieux faire
Deuxième motif de satisfaction, la France parviendrait à réduire davantage les inégalités constatées à la racine que ses homologues européens : « Un résultat obtenu pour moitié par l’effet des prestations sociales en espèces (allocations logements, chômage, etc.) et pour moitié par les prélèvements obligatoires directs sur les ménages (impôt sur le revenu, taxe d’habitation etc.) », précise l’étude de France Stratégie. Malgré tout, les données s’appuient sur une période qui a précédé les réformes fiscales comme la transformation de l’ISF… la conclusion vaut-elle toujours aujourd’hui ?
La France garde encore une marge de manœuvre pour combattre les inégalités. Sur le ciblage opéré par la redistribution notamment, puisque le volume des prélèvements obligatoires se retrouve nettement plus élevé en France, environ 37 % du revenu primaire des ménages, contre 34 % pour la moyenne européenne, et avec un ciblage identique. Pour France Stratégie, un meilleur ciblage permettrait « soit de réduire les volumes transférés sans accroître les inégalités, soit de réduire davantage les inégalités sans accroître les masses transférées. » Voilà une étude qui a de quoi remettre les pendules à l’heure. Ou nourrir encore un peu plus le débat ! GW.