Temps de lecture estimé : 2 minutes
Temps de lecture constaté 2’40

Plus de 130 discothèques sont en liquidation judiciaire.
Muettes depuis plus d’un an, nos discothèques espéraient un horizon, une perspective, un espoir. Rien de tout cela. Le gouvernement a présenté son calendrier de déconfinement en quatre étapes. Les musées, théâtres, cinémas rouvriront le 19 mai. Les restaurants, complètement, le 9 juin. Les parcs d’attractions aussi retrouveront leur public. Les discothèques, elles, patienteront encore. Du moins celles qui parviendront à survivre. Avec le témoignage de Patrick Malvaës, président du Syndicat national des discothèques et lieux de loisirs (SNDLL).
Les seuls établissements exclus du retour à la vie d’avant. Dans un monde régi par la loi Sars-CoV-2 – à coups de gestes barrières, distanciation sociale et couvre-feu – les discothèques n’ont pas leur place. Pointées du doigt comme le lieu de transmission du virus par excellence. Encore faudrait-il le prouver. « Les discothèques sont fermées depuis plus d’un an, or cette fermeture n’a pas entraîné un degré moindre de l’intensité épidémique », souligne Patrick Malvaës. Mieux, « les discothèques auraient pu éviter certaines fêtes clandestines privées ou publiques, là où les gestes barrières ne peuvent être sous contrôle », surenchérit le président du Syndicat national des discothèques et lieux de loisirs.
« On ressent un mépris »
Les professionnel·les du secteur entendent les préoccupations sanitaires de la part du gouvernement. Mais dénoncent cette « inégalité de traitement » qu’ils subissent. L’été 2021 pourrait ressembler à son acolyte 2020, la réouverture de tout, sauf les boîtes de nuit. « L’été de tous les dangers », pour Patrick Malvaës. Comme un sentiment du deux poids deux mesures. D’ailleurs, incomprises, les discothèques – via notamment la branche Nuit du syndicat Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie) – s’en remettent à un référé auprès du Conseil d’État et dénoncent « une discrimination ». Une nouvelle façon de se faire entendre puisque le « Plan Marshall » proposé auparavant, avec, entre autres, le protocole à suivre pour une réouverture, n’a pas été entendu. « On n’a pas eu de retour, on ressent un mépris […] Comme si les gérant·es de discothèques étaient des entrepreneur·es de seconde zone », regrette Patrick Malvaës.
Encore trop tôt alors pour rouvrir les discothèques, même au 30 juin ? « Regardez ce qui a été fait à Barcelone avec un concert test qui n’a pas débouché sur une envolée des contaminations à la covid-19 », fait savoir le président du Syndicat national des discothèques. Exact, le 27 mars, la ville de Catalogne avait organisé un concert test avec 5 000 personnes. Au programme, port du masque et tests antigéniques. Résultat, « il n’y a aucun signe qui suggère qu’une transmission a eu lieu pendant l’événement », décrivait Josep Maria Llibre, docteur à l’hôpital Germans Trias i Pujol de Badalone.
Un accompagnement insuffisant
« Non seulement on nous impose une fermeture, mais en plus, les aides de l’État ne sont pas adaptées ! », lance Patrick Malvaës. Les discothèques bénéficient pour l’heure du fonds de solidarité (rémunération calculée sur 20 % du chiffre d’affaires). Bien trop peu pour le président du Syndicat des discothèques : « Financièrement, il faudrait une aide forfaitaire, un salaire équivalent à un Smic et demi par exemple et prendre en compte l’endettement des exploitant·es ». Car oui, pour monter leur affaire, les gérant·es de discothèques n’ont souvent d’autres choix que se diriger vers des cautions personnelles. « Ce qui rappelle aussi que le secteur, souvent ostracisé, ne bénéficie guère des prêts accordés par les banques », fustige le président du SNLL. Pour rappel, plus de 130 discothèques sont en liquidation judiciaire. Pour le moment.
Enfin, dès lors que les discothèques rouvriront, elles devront patienter un peu avant de retrouver leur clientèle habituelle. « À la réouverture, on ne s’attend pas à un redémarrage du jour au lendemain » […] Pour certaines jeunes générations, cette longue fermeture fait qu’elles n’ont toujours pas connu les discothèques. Alors pourquoi se ruer vers un produit inconnu ? Et pour les habitué·es, il faudra dépasser la frilosité liée à l’épidémie », détaille Patrick Malvaës. À qui l’on souhaite, ainsi qu’à tous·tes les professionnel·les du monde de la nuit, une réouverture rapide. Leur survie en dépend.
Geoffrey Wetzel