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Christophe Cousin est président de l’agence Win-Win, fondée en 2007 et spécialisée dans le marketing expérientiel.
L’événementiel représente un de ces secteurs qui se retrouvent depuis près d’un an à l’agonie. À l’ère covid où triomphent gestes barrières et distanciation sociale, la filière de l’événementiel n’a pas eu d’autres choix que de se réinventer. Un des piliers pour les entreprises pour poursuivre leur activité – ou un semblant – et continuer à communiquer : l’événementiel numérique. Chez Win-Win aussi, il a fallu repenser son activité, et d’après les mots de son président Christophe Cousin, la crise sanitaire a bouleversé la façon d’organiser des événements… y compris post-covid ! Entretien.
Votre agence Win-Win a vu le jour en 2007. Comment caractériseriez-vous l’évolution de l’événementiel numérique : simple effet covid ou tendance de fond ?
La crise covid-19 demeure accélératrice et révélatrice d’une tendance de fond. Comme un coup d’arrêt à une surenchère de l’événementiel avec derrière un objectif de toujours plus spectaculaire. Cela devenait malsain. Alors oui, la filière de l’événementiel souffre de la crise, mais on voit aussi une opportunité, voire un rappel à l’ordre quant à la façon de penser l’organisation des événements. Avec le numérique, on retrouve l’objectif central de l’événementiel qui est de faire passer un message. Les client·es se concentrent davantage sur le contenu et non sur les à-côtés… On assiste à un changement de paradigme essentiel. Ce que l’on a à dire devient le centre de l’événement.
De là, je crois vraiment que l’événementiel digital perdurera. Y compris post-covid. En 2019, on se serait sans doute rencontrés pour cette interview. Aujourd’hui et même demain, on la mène – et on la fera à distance – et c’est pareil pour l’événementiel. Avant, il fallait justifier la raison pour laquelle on ne voulait pas se déplacer, c’est désormais l’inverse. Qu’est-ce qui justifie une présence physique ? Que m’apportera en plus cette présence par rapport à une participation à distance ? On attend une raison – particulière – à un déplacement. C’est un gain de temps incroyable. À l’avenir, je pense qu’un événement sur deux se déroulera 100 % à distance. Le reste ? Sans doute sous le mode de l’hybridation (mi-physique et mi-distanciel).
Quels intérêts à opter pour un événement non plus physique mais numérique ?
Un événement physique, à la minute où il s’achève… eh bien c’est terminé ! Le numérique, tout reste. Vous pouvez revoir un événement grâce aux replays… Les contenus continuent de vivre. Ce qui a une influence aussi sur la qualité du message transmis. Quand on sait que quelque chose va durer, vous vous adaptez et vous faites en sorte de rendre ce message digne d’intérêt, utile. En outre, l’audience se révèle bien plus large. D’abord parce que plus de personnes peuvent accéder à un événement. Et surtout, les contenus seront ensuite partagés sans compter et réutilisés.
Mais globalement, le grand public et les collaborateur·rices sont sujet·tes à une prise de conscience – et notamment – environnementale. Il faut en finir avec tout ce gâchis, très présent lors des événements physiques. Faire venir des gens de loin pour un contenu parfois très discutable, c’est dommage. Bien sûr, puisque l’événementiel numérique prendra une place croissante, il faudra s’attaquer aux brèches liées à la fracture numérique. Pour que toutes et tous puissions avoir un accès de qualité. Les événements numériques devront adopter des principes de vélotypie, des sous-titres en live pour les personnes malentendantes par exemple.
Malgré tout, n’y a-t-il pas un risque de rompre le lien social, très cher aux événements physiques ?
Sans doute, mais on l’aura choisi. L’événement numérique n’aura plus la même fonction que l’événement physique. Chez Win-Win, nous avons eu des retours, les client·es témoignent d’une meilleure compréhension des informations transmises, « on a tout compris ! », ai-je entendu. Mais évidemment, on perd le plaisir. Ce n’est plus le même but. Je pense que dans le futur, nous nous appuierons sur les événements digitaux pour transmettre un contenu, communiquer et – plus globalement – travailler. L’enjeu sera donc de proposer des contenus pertinents et user de l’interaction – même à distance – pour garder l’attention de son public. Les événements physiques ne serviront qu’à renforcer la cohésion, prendre du plaisir et s’amuser. En clair, ils devraient contribuer à se rassembler en vue de tout faire sauf… bosser ! Dans les entreprises, le changement semble acté, on l’a vu avec le fort développement du télétravail. On imagine un nouveau monde.
Propos recueillis par Geoffrey Wetzel