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La guerre aux portes de l’Europe réveille l’histoire, celle de la peur, celle des dictateurs, celle de l’horreur et celle de l’honneur.

Faut-il sauver le soldat malgré lui Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine ? Oui, bien sûr, en envoyant sur le front des soldats européens et pas seulement des armes ? C’est la question à laquelle les « alliés » européens répondent « non » avant même le conflit ouvert, celle à laquelle Joe Biden a dit « non » dès les premiers bruits de bottes. On est de tout cœur avec toi, camarade Zelensky, mais à nous aussi Poutine fait très peur.
Du centre de Kiev, un chef d’entreprise français, Pascal Boiteux, en direct sur France Inter, a justement posé clairement l’enjeu de la peur : « Il faut aider l’Ukraine militairement. Sinon, l’Europe et les États-Unis montrent leur peur à Poutine. Or le dirigeant russe ne s’arrêtera que lorsqu’on l’arrêtera. »
Il est incroyable en 2022 de se poser la question de la guerre ! D’envisager d’envoyer l’armée de métier française combattre aux côtés des soldats ukrainiens et de risquer la vie de nos militaires. Mais justement, non, de ne pas l’envisager. S’est-on posé la même question au Mali ? Les cérémonies d’hommage aux jeunes soldats tués en Afrique ont-elles paru insupportables ? Un éditorialiste bien planqué devant son écran est-il légitime à évoquer des parachutages de jeunes vies dont c’est le métier choisi que de risquer leur peau face aux balles russes ? Mais c’est au jeune président français que je pose la question : vous avez lutté militairement contre les djihadistes, le ferez-vous contre les terroristes russes ? Si la justification de l’action passe par une procédure accélérée d’adhésion de l’Ukraine à l’Otan – cauchemar de Poutine –, ne faut-il pas l’évoquer, quitte à bousculer les lourdes procédures ?
Poutine a brandi la menace nucléaire ! Il a brisé le tabou absolu des détenteurs de la bombe atomique qui consiste justement à ne jamais l’évoquer. Désormais, c’est à un fou que nous avons affaire.
L’instant est vertigineux et rappelle le même dilemme vécu à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Un peu d’histoire :
1935, l’Allemagne trahit le traité de Versailles et rétablit le service militaire. Ni la France ni la Grande-Bretagne ne pipe. 1936, remilitarisation de la Rhénanie, ce ne sera pas un cas de belligérance. En mars, rattachement autoritaire de l’Autriche à l’Allemagne (Anschluss). Pas un mot de ce qui n’est pas encore l’Europe. En septembre, Hitler enlève la région des Sudètes à la Tchécoslovaquie. La France laisse faire. Idem quand l’Allemagne hitlérienne démantèle le reste du pays. Le 1er septembre 1939, l’envahissement de la Pologne déclenche la déclaration de guerre de la France et de la Grande-Bretagne. On connaît la suite.
L’envahissement de la Pologne à l’époque vaut-elle l’envahissement de l’Ukraine ? Assurément. Et cette fois, c’est toute l’Europe et les États-Unis qui devraient se persuader qu’après l’Ukraine le Poutine hitlérien envahira la Biélorussie, les États autrefois sous la coupe soviétique et… quoi ?
La diplomatie a échoué. Treize soldats ukrainiens, sur l’île du Serpent, sommés de se rendre, ont envoyé « se faire foutre » les soldats russes et… ont été massacrés ! Les sanctions économiques, du reste à double sens, ne se feront sentir en Russie qu’après les conquêtes programmées, comme ce fut le cas en Allemagne le siècle dernier. Un président aux abois, Volodymyr Zelensky, en appelle les pays de l’Otan à venir au secours de son pays, lui qui se sait en sursis. On se prépare à le laisser mourir. Si la France veut bien l’accueillir comme réfugié, elle n’ira pas le chercher. Pas davantage l’Allemagne ni la Grande-Bretagne.
Nous vous posons cette semaine une question : selon vous, la France (ou l’Europe) doit-elle combattre militairement la Russie ? Une autre question, que personne ne pose dans les médias, pourrait aussi solliciter vos avis : le Président de la France, et de l’Europe, candidat à sa succession non déclaré, se retrouve désormais accaparé par le conflit. Alors, sans possibilité manifeste de mener campagne pour sa réélection, sinon à la marge, faudrait-il retarder le scrutin ? Une hypothèse qui sera sans doute rejetée, on ne sait pas d’ailleurs si elle avantagerait ou pas le président sortant, mais qui a le mérite d’être posée.
Décidément, Emmanuel Macron aura été le président français des crises.
Mais il est un autre président qui joue sa vie et celle de son peuple. Et cet homme-là, l’Europe ne doit pas l’abandonner.