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Personne ou presque n’ose s’élever contre des génocides non humains perpétrés en ce moment même au nom de la positive attitude. Mais comme le cite souvent le plus optimiste d’entre nous, notre chroniqueur Thierry Saussez, si « nous avons conscience que la vie est belle à proportion qu’elle est féroce », elle l’est parfois trop pour positiver la férocité.

Les dystopies – récits de fiction qui imaginent une humanité décimée ou sous un joug totalitaire – n’ont pas encore osé camper une pandémie abominable qui faucherait des millions d’humains. Ou pire, des États dictatoriaux comme La Chine qui, au nom d’une politique 0 covid, élimineraient en les euthanasiant des millions de Chinois… Scénarios impensables, n’est-ce pas ?
Quelle mouche venimeuse l’a donc piqué, cet éditorialiste lugubre, alors que le monde entier aspire/espère une extinction progressive du coronavirus à partir de mars ?
C’est vrai qu’en matière d’optimisme, je pourrais faire mieux. L’activité économique repart de plus belle, les chômeurs trouvent des emplois, les filières augmentent les salaires, la France démarre enfin son compteur à « licornes » (start-up valorisées à plus d’un milliard d’euros) et sur fond d’élection présidentielle tous les candidat·es peaufinent des programmes de lutte contre l’inflation ou du moins multiplient les mesures d’aide au pouvoir d’achat.
Pourtant, il faut bien, ne serait-ce qu’une fois, que l’éditorialiste en question rappelle que ces récits d’euthanasies massives, par millions de sujets, ne sont pas une fiction… pour des millions de canards, d’oies et autres visons que, du sud-ouest au nord en France, et partout dans le monde, on abat pour cause de grippe aviaire. Un H5N8 fort proche d’un coronavirus. L’information fait l’objet d’une brève dans les JT, puis l’on embraie sur l’annonce du médicament miracle Pfizer. Et au mieux, l’on s’apitoie sur le sort des éleveurs : 150 millions d’euros de pertes en 2021 – et autour de 500 millions d’euros pour l’ensemble de la filière avicole selon certains syndicats. Pas rien !
L’éditorialiste de mauvais augure, lui, pense, puis oublie, comme Dutronc en son temps, aux 2, 3, 5 millions d’animaux (pour la France seule) nés pour mourir dans des conditions effroyables : exterminés dans des abattoirs débordés ou des « plates-formes provisoires » qui n’appliquent déjà pas les règles minimales de moins mauvais abattage possible pour ces êtres vivants quand ils ne sont pas massacrés à la chaîne dans les élevages eux-mêmes sans le moindre dispositif de mort rapide. Enterrés, brûlés, peut-être encore agonisants.
L’humanité qui a suscité ces épidémies dans ces élevages d’un autre âge où l’on sacrifie ces animaux pour leur fourrure, leur viande ou leur foie commence à se contaminer elle-même à leur contact. Elle procède à des « génocides » animaliers simplement pour réamorcer des élevages dont on espère qu’ils ne contracteront pas la grippe aviaire. Auquel cas, on recommencera la danse macabre…
La vaccination pour ces élevages existe. Le virus a beau la prendre de vitesse, elle pourrait, comme pour les humains, finir par enrayer la pandémie. Mais ne vaut-il pas mieux occire dans n’importe quelles conditions des animaux qui souffrent plutôt qu’enrichir des laboratoires ? Ces sales bêtes qui auraient la possibilité de contaminer les humains, je leur demande pardon, aussi insensée soit ma prière.
Il arrive que l’on doive plomber l’ambiance en se souvenant que l’on appartient à l’humanité…