Pour notre bien, vraiment ?

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La perspective de lever le masque fin juin, au moins à l’extérieur, relève de l’arbitraire. S’il a fallu se plier aux exigences protectrices, il faut aussi se préoccuper des exigences surprotectrices. Le masque ne doit pas devenir une stupide « habitude », rassurante ou pas.

Olivier Magnan, rédacteur en chef

Quelle surprenante procession que cette population sans visage qui reste accro à ses masques, même si les uns les portent sous le nez ou carrément sous le menton. Même si les fumeurs s’en croient exemptés, comme les patineur·ses, les trottineur·ses et les promeneur·ses des plages. Même si certain·es n’en portent pas du tout. Même si quelques municipalités décident de se passer du feu vert élyséen. Quels déroutants interdits que ces panneaux à l’entrée des rues et des magasins. D’abord réputé inutile, le masque est devenu le passeport de circulation indispensable avant le pass, il demeure la contrainte majeure d’un peuple en rémission.

Porterons-nous désormais l’écran plus ou moins homologué « à vie » ? Le Premier ministre Jean Castex, qui s’en est fait son étendard, n’est pas loin de le penser. Au Parisien, l’éphémère chef de gouvernement dit y voir « à l’avenir un moyen de protection naturel au-delà de la covid », à la manière asiatique. Pressent-il « des » covid à répétition ou le moyen simple d’éviter de refiler la grippe à ses proches, il ne s’en explique pas.

Du côté de ces médecins et infectiologues qui ont hésité tant et plus et dont la ronde sur les plateaux les montrait tour à tour avec et sans masque, l’unanimité n’est pas de mise, comme elle ne l’a jamais été. Arnaud Fontanet, du Conseil scientifique, est promasque tant que 80 % des adultes n’auront pas été vaccinés et si l’on passe sous les 5 000 cas par jour, ce qui semble se confirmer. Mais l’épidémiologiste Martin Blachier évoque un « consensus scientifique » pour préconiser la levée de l’obligation du port du masque à l’extérieur. Rejoint par un médecin généraliste cité par le magazine Elle : « Le masque à l’extérieur ne sert absolument à rien. » Consensus ?

Le ministre médecin de la Santé ? « On ne demandera pas aux Français de porter le masque un jour de plus qu’il n’est nécessaire. » Comme la nécessité en est d’ores et déjà contestée, il se place en fâcheuse posture. Les tout récents clusters réprimés ne semblent pour l’heure pas susciter de foyers de reprise.

Mais si ce masque désormais inutile n’est plus une prophylaxie, il est un signal politique. Le rappel que nous sommes contraint·es par une autorité à nous plier à sa volonté, que nous devons lui obéir au nez et à la bouche, et même pas pour notre bien puisque les masques pollués et l’absence de repères faciaux pour les tout-petits (pourtant essentiels) nous portent préjudice. La covid, maîtrisée ou non, maîtrisable ou pas, nous a collé le « signe de Zorro » comme la marque peu discrète de notre peur et de notre obéissance.

Olivier Véran laisse entendre que ce port obligatoire sera levé à la fin du mois de juin. Perspective purement arbitraire et provisoire peut-être. L’on sait à présent que, « pour notre bien », l’État français est en mesure de nous imposer tout et son contraire. Même si le masque risque de jouer en notre défaveur.

Le doyen de la tribu. Ai connu la composition chaude avant de créer la 1re revue consacrée au Macintosh d'Apple (1985). Passé mon temps à créer ou reformuler des magazines, à écrire des livres et à en traduire d'autres. Ai enseigné le journalisme. Professe l'écriture inclusive à la grande fureur des tout contre. Observateur des mœurs politiques et du devenir d'un monde entré dans le grand réchauffement...

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