Les bachelier.ères « covid », l’année de trop ?

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Le baccalauréat, ce monument français que l’on se doit de sacrifier…

Geoffrey Wetzel

Faut-il supprimer le baccalauréat ? Vous avez quatre heures. Cette année, 91,5 % des candidat.es ont décroché le précieux sésame avant même le rattrapage. Un record absolu – en partie – expliqué par le caractère inédit de cette édition – basée sur le contrôle continu –, ce qui rend toutes les comparaisons absurdes. Une victoire au dopage en quelque sorte. Le plus populaire des diplômes français ne vaut plus rien. Mais on s’entête à le conserver, un rite de passage auquel personne ne doit échapper.

Ce bac 2020 aura eu le mérite d’éviter une chose : nous épargner les scènes de liesse surjouées de jeunes excité.es à l’annonce des résultats, soumis.es à des reportages journalistiques souvent insipides et toujours attendus. Des résultats délivrés pour la majorité en ligne, sans surprise, sans euphorie, sans joie finalement, mais des jeunes Français.es consolé.es par Emmanuel Macron qui a laissé derrière lui les fameux « examens en chocolat » pour les félicitations.

Les lycéens « covid » se plaignent d’un bac au rabais ? Ils.elles ont du retard à l’allumage, belle lurette que le baccalauréat a perdu toute sa substance ! Bien loin de 1968 où 20 % d’une génération détenaient l’examen, ne pas l’obtenir aujourd’hui – dans le cas où on le tente , constituerait une véritable maestria. Avec en filigrane, des exigences de moins en moins élevées et une pression exercée sur les professeurs pour tirer les notes à la hausse. À des années lumière de la sacro-sainte méritocratie !

Mais étonnamment, c’est une institution indéboulonnable. Un rituel avant le supérieur. Le baccalauréat s’apparente à une routine qui en insupporte beaucoup, mais encore enjolivée par une dictature de la minorité. Comme les repas du dimanche en compagnie de la belle-famille. C’est excessivement emmerdant, mais toujours à l’heure le dimanche midi.

Non, le bac ne vaut plus rien. Et c’est précisément parce qu’il a perdu sa fonction ostentatoire qu’il demeure plus que jamais handicapant de le contourner. Face à une inflation des diplômes (dixit le sociologue de renom Jean-Claude Passeron), si aucun jeune ne se démarque avec le diplôme en poche, alors pensez à celles et ceux qui ne l’obtiendraient pas… les marginaux d’aujourd’hui. Moins le bac aura de valeur, plus il sera indispensable de rentrer dans les rangs. Sous peine d’être montré.e du doigt.

Et si l’année 2020 avait raison de ce monument français ? L’enseignement supérieur a montré cette année qu’il se foutait royalement des épreuves couperets pour choisir ses nouveaux.nouvelles étudiant.es. Bac ou pas, Parcoursup, lui, avance tête baissée. On plaint déjà Frédérique Vidal, qui devra se dépatouiller d’un angoissant bourbier : accueillir les centaines de milliers de néo-bachelier.ères sur les bancs de l’université ! Le chiffre d’un étudiant sur trois qui obtient sa licence en trois ans pourrait bien battre de l’aile. Preuve de plus que le secondaire ne prépare pas – ou mal au supérieur ! Condamné à laisser la main à la sélection « naturelle » de l’origine sociale, premier facteur de réussite scolaire en France.

Voilà maintenant a minima des décennies que le débat se perpétue, mais cette année ne ressemble à aucune autre : le PSG toujours en lice en Ligue des champions, Jean Castex nommé Premier ministre, et ce fichu Sars-CoV-2 qui a déréglé pendant un temps et peut-être à plus long terme , notre façon de vivre. Alors, oui, je me persuade que  « le nouveau chemin dessiné » par le Président de la République sacrifiera ce qui a été créé en 1808…

Geoffrey Wetzel, journaliste à la rédaction

 

Journaliste-Chef de service rédactionnel. Formé en Sorbonne – soit la preuve vivante qu'il ne faut pas « nécessairement » passer par une école de journalisme pour exercer le métier ! Journaliste économique (entreprises, macroéconomie, management, franchise, etc.). Friand de football et politiquement égaré.

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