Le pire serait de promettre de vacciner gratis

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Le monde scientifique sait que le vaccin rapide et universel est encore un leurre. Ne pas le dire est une faute.

Olivier Magnan, rédacteur en chef

Attendre le vaccin… Quand le vaccin sera là… Sans doute avant la fin de l’année… Un jour prochain, la pandémie sera un mauvais souvenir grâce au vaccin. Ô Pasteur, ô Jenner, ô vache, la vacca qui donna vaccin, l’humanité vous doit tant… Mais aura-t-elle droit au vaccin contre la rage… du coronavirus, cette fois ? Même si, au nom de l’optimisme et de la foi en notre génie scientifique nous pouvons toujours le postuler, en être certain, mordicus, je préfère prôner un optimisme « opérationnel », comme l’exprime Jean-Luc Hudry, entrepreneur, auteur d’un livre éponyme (5e brève). Et mon optimisme opérationnel me souffle : ne comptons donc pas tant sur un vaccin, unique, universel, efficace sur toutes les formes de la covid, du péon argentin au nouveau président Joe Biden (heu, là, je fais de l’anti-Trump primaire…).

Pourquoi ? Parce que les scientifiques eux-mêmes doutent qu’un tel vaccin existera jamais, ou, aussi efficace et universel, pas avant quelques années et quelques résurgences d’un autre coronavirus. La conclusion d’un article scientifique entre plusieurs autres, parfaitement documenté, ne laisse guère de doute : « Il est fort improbable qu’un vaccin joue un rôle significatif dans la résolution de l’actuelle pandémie de covid-19. » Bien sûr, le même article s’empresse d’ajouter que « la mobilisation massive actuelle des chercheurs institutionnels, académiques ou industriels pour la mise au point d’un vaccin efficace contre le coronavirus est cependant non seulement licite mais indispensable. » Pas question, effectivement, de ne pas anticiper « une prochaine pandémie qui ne manquera pas de survenir » (dixit le même article).

Une autre réalité repousse la vraisemblance d’un vaccin efficace vers la fin de l’année : « Aux Pays-Bas, une femme de 89 ans est devenue la première personne connue à mourir de la covid-19 après avoir été infectée à deux reprises », publie LCI. On se réinfecte donc, ce qui jette à bas l’espoir de l’immunisation acquise. Or qu’est-ce qu’un vaccin ? Un virus mort ou affaibli qui, sans engendrer les symptômes de la maladie, déclenche la défense du système immunitaire pour parer à la rencontre à venir avec le virus actif. Si l’on se réinfecte alors que ledit système immunitaire est censé préparé à une nouvelle attaque par la précédente contamination, c’est que le principe du vaccin est inopérant sur ce type de coronavirus. Je m’appuie pour le suggérer sur mon échange récent avec la docteure Odile Duvaux, scientifique aguerrie à la tête de Xenothera dont j’ai souvent parlé : pour elle, l’immunisation vaccinale risque de se révéler vaine (d’où son approche par anticorps qui déclenche un autre mécanisme en s’attaquant à la charge virale existante et non à une infection à venir). Et je crois avoir compris que la communauté scientifique en est parfaitement consciente.

Il nous faut donc nous préparer à une déception. Il n’y a rien de pessimiste dans la préparation mentale à une réalité. Au contraire, l’optimisme consiste, en l’occurrence, à penser que les précautions sanitaires respectées suffiront à enrayer la galopante chevauchée de cet incontrôlable virus, que la recherche nous vaudra des masques supportables, transparents et écologiques, que l’organisation du travail déjà engagée contribuera à éteindre l’épidémie et que des tests réguliers enfin efficaces, en isolant le temps réduit voulu les porteurs, pousseront les autorités à l’idée qu’un surplus permanent de lits vaut mieux qu’un risque de pénurie tous les dix ans.

Car le pire, je pense, serait de continuer à faire semblant de croire que demain l’on vaccinera gratis – comme l’on promet de raser gratis. Une autorité qui déçoit n’est plus une autorité. Une autorité (française ou non) qui répète que tout rentrera dans l’ordre grâce au vaccin fait du trumpisme. Quel ordre ? Celui d’avant ? Surtout pas. Transition écologique et pandémies sont désormais liées. Restaurons les forêts, abattons le CO2, bâtissons résolument des villes pérennes pour une humanité pérenne qui cesse de décimer ses partenaires abeilles. L’optimisme est là. Il remet tout en question.

Olivier Magnan

Le doyen de la tribu. Ai connu la composition chaude avant de créer la 1re revue consacrée au Macintosh d'Apple (1985). Passé mon temps à créer ou reformuler des magazines, à écrire des livres et à en traduire d'autres. Ai enseigné le journalisme. Professe l'écriture inclusive à la grande fureur des tout contre. Observateur des mœurs politiques et du devenir d'un monde entré dans le grand réchauffement...

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