Le manifeste discret d’un Président plus cornucopien du tout…

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Quelque peu discrètement, Emmanuel Macron a lancé le grand message de son ultime quinquennat : l’abondance, c’est fini. Il faut le prendre très au sérieux.

Olivier Magnan, rédacteur en chef

Nous y sommes. J’oserais écrire, « enfin ». Et pourtant, rien de positif dans ce constat : ah oui, tiens, nous vivons le grand réchauffement climatique ! Même les climatosceptiques souffrent de la chaleur (ils montent un peu la clim). Il n’y a que 50 ans que les clairvoyants le prédisaient (rapport Meadows du Club de Rome). Et nous n’avons rien fait. Nous, les politiques, les citoyens, les entrepreneurs, les agriculteurs du monde entier. Parce que nous n’y avions aucun intérêt. Parce que notre confort risquait d’en souffrir. Parce que notre croissance allait en pâtir. Et pourtant : si, il y a 50 ans, l’anthropocène avait enclenché un processus globalisé de réduction des gaz à effet de serre, tout serait sous contrôle ou presque.

Mais l’humain est incapable de sapiens, de sagesse, malgré le nom de son espèce. Incapable de vision. Il est dans sa nature de se gaver et de tomber malade, quitte à disposer des espèces (animales, pas monétaires), mais à son détriment.

Ce constat rabâché, un signe : le président de la République qui n’a rien fait durant cinq ans prévient tout soudain ses ministres dans l’orchestration d’un conseil éponyme ouvert aux médias (ce n’est pas une adresse directe au peuple, c’est plus discret, moins engageant, mais c’est dit) : fin de l’abondance, fin des évidences, fin de l’insouciance. Ces bouts-rimés sont exceptionnels et essentiels. C’est quand même la première fois qu’une incarnation et un garant de l’abondance, le président de la République, annonce la fin du système « cornucopien » (de cornucopianisme, venu de « corne d’abondance », fondement du système industriel occidental). Un système qui érige le progrès technique en « moteur éternel de la croissance économique », comme le soulignent nos confrères de la revue scientifique Epsiloon. Or, explicitement, Emmanuel Macron, qui n’a plus rien à perdre ou presque, nie cette fausse voie de salut. C’est historique. Et déterminant.

Désormais, citoyens, industriels, agriculteurs devront sacrifier une part de l’abondance et de l’insouciance. Dans la foulée, les patrons (convention du Medef), bien plus pratiques que les autres composants de la société, disent entendre le message et s’y mettre. C’est essentiel. Car ce sont eux et elles (de plus en plus « elles ») qui seront le moteur, non de l’abondance, mais de l’amorce d’une société encore productive en quête d’une neutralité carbone qui n’évitera pas les catastrophes, mais, peut-être, la fin de l’humanité. Car on en est là. Tout l’enjeu du politique, désormais, est d’aider les producteurs à limiter les dégâts. Emmanuel Macron l’a peut-être enfin compris.

Le doyen de la tribu. Ai connu la composition chaude avant de créer la 1re revue consacrée au Macintosh d'Apple (1985). Passé mon temps à créer ou reformuler des magazines, à écrire des livres et à en traduire d'autres. Ai enseigné le journalisme. Professe l'écriture inclusive à la grande fureur des tout contre. Observateur des mœurs politiques et du devenir d'un monde entré dans le grand réchauffement...

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