Cinq ans pour éviter la greffe

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Il existe, dans ce pays, des économistes prudents, qui connaissent leur affaire, capables de soigner la vieille France avant qu’elle ne relève du bistouri du chirurgien Mélenchon. Le président de l’hôpital  – résigné à ne pas en faire un centre de profits – ferait bien de les écouter.

Olivier Magnan, rédacteur en chef

Il nous faut le diagnostic du bon docteur Artus, associé à notre consœur Marie-Paule Virard, et ce diagnostic a l’heur de tomber tous les 4 ou 6 mois, sous la forme d’un petit livre prodigué par l’excellente éditrice Odile Jacob. Une ordonnance rédigée par ce vieux sage de conseiller Natixis, Patrick Artus, à la manière d’un médecin de famille qui, à défaut de jouer les grands manitous de chirurgiens spectaculaires façon Grey’s Anatomy, soupèse les symptômes et prescrit des remèdes éprouvés.

Sur l’ordonnance intitulée Pour en finir avec le déclin (75 % des Français pensent que le pays est en déclin, étude Sopra-Steria-Le Monde, septembre 2021), l’écothérapeute pose son diagnostic.

La patiente France a besoin d’une « augmentation du pouvoir d’achat des salarié·es les plus modestes ». D’une « réduction des inégalités de patrimoine ». De « la montée en puissance de la transition énergétique ». De « la modernisation et la digitalisation des entreprises ». De « la préservation de la solvabilité de l’État et de la soutenabilité de la dette publique. ». Mais surtout, écrivent les docteurs, le pays a besoin d’une « amélioration de la qualité de l’éducation et des compétences ». À vrai dire, voilà le vrai remède de cheval. France ne se remettra que si elle forme enfin sérieusement, scientifiquement, efficacement des « jeunes sans qualification ni emploi, des chômeurs ou des seniors ». Les deux praticiens misent tout sur cette stratégie thérapeutique qu’est la formation des jeunes sans emploi ni étude, le recrutement massif d’apprenti·es, la formation efficiente des chômeur·ses, la formation professionnalisante dans les TPE/PME, le retour à des études mathématico-scientifiques enfin du niveau des jeunes Ukrainiens (!), et les reconversions des emplois menacés.

D’où le premier traitement : « augmenter les bas salaires ici et maintenant ». Posologie : flécher les budgets de formation vers ceux et celles qui « en ont le plus besoin » – les chômeurs – pour des formations enfin adaptées et utiles (en finir avec une « gabegie de dizaines de milliards », un « pognon de dingue », dixit Macron I). Effet estimé dans « le moyen-long terme ». Plus rapide : que les entreprises – elles ont commencé, contraintes et forcées par la pénurie – augmentent le salaire du livreur de pizzas, de l’agent de sécurité, de l’aide ménagère, de la garde à domicile. Ajuster les bas salaires à l’inflation. Hou, que ça fait mal…

La réduction des inégalités de patrimoine devient, chez Artus-Virard, un chapitre étayé. Les soignants suggèrent la fin des politiques monétaires expansionnistes (plus de perfusions de monnaie fraîche de la part des banques centrales, notamment l’européenne, avec le risque en retour d’effets de décompensation déclencheurs de vertiges). Et quelques autres traitements où l’offre remplace la demande.

Ils prônent avec autant de sens de l’urgence le financement de la transition énergétique à coups de pression fiscale, de taxation du capital, de taxe carbone.

L’ordonnance aligne ses feuillets avec le reste des propositions tracées à l’encre rouge des urgences. Aucun doute : les deux thérapeutes ne sont nullement des chirurgiens comme rêverait d’opérer sans anesthésie un as du bistouri comme Jean-Luc Mélenchon, autrement dit ils s’inscrivent dans un modèle non révolutionnaire de moyen-long terme.

Mais si Macron II voulait bien jouer les chefs de service et mettre en jeu, calmement mais obstinément, les ordonnances d’Artus-Virard, il aurait une petite chance en cinq ans de sauver France sans devoir laisser à sa succession la nécessité d’une greffe cœur-poumon.

PS : le secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, rassemble les notes des ministres consacrées à leurs idées pour le quinquennat à venir. Il se dit dans l’entourage de ce 1er ministre officieux que l’éducation et la formation tout au long de la vie constitueront des axes majeurs. Écouterait-on le médecin ?

Le doyen de la tribu. Ai connu la composition chaude avant de créer la 1re revue consacrée au Macintosh d'Apple (1985). Passé mon temps à créer ou reformuler des magazines, à écrire des livres et à en traduire d'autres. Ai enseigné le journalisme. Professe l'écriture inclusive à la grande fureur des tout contre. Observateur des mœurs politiques et du devenir d'un monde entré dans le grand réchauffement...

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