Vers la décroissance ?

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Hier, lundi 26 juin, a eu lieu l’édition 2023 de l’USI, au Musée du quai Branly-Jacques Chirac. On y retrouve depuis 2008, des experts en économie, en sciences, en technologie et en philosophie pour contribuer au progrès des organisations. La thématique cette année : l’entreprise à l’épreuve des limites du monde ! Quelles motivations pour une bifurcation des modèles d’affaires ?

Le brigadier retentit, trois coups. L’art inaugure cette journée de conférences – comment faire autrement dans un musée ? Sur scène, la danse d’un artiste, frénétique, sur un amas de sacs en plastique interpelle. Manquant de s’étouffer en essayant de faire corps avec la matière à sa disposition, le danseur est en transe, il nous dépeint le portrait des hommes prisonniers de leurs chaînes.

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », Antoine de Lavoisier, chimiste français. En 1824, le jeune Sadi Carnot, physicien et ingénieur français, s’intéressant au rendement des machines à feu, fonde une nouvelle science : la thermodynamique. Il se concentre alors sur les transformations qui se déroulent à l’intérieur de la machine au fur et à mesure qu’elle utilise son combustible, deux principes en découlent :

  • Un principe de conservation selon lequel rien ne se perd, les éléments constitutifs du morceau de charbon que l’on brûle se retrouvent intégralement conservés à l’intérieur de l’Univers, à l’état de cendres, particules et fumées.
  • Un principe de dégradation qui exprime le fait que, si le charbon consumé existe toujours, c’est dans un état de déstructuration qui lui interdit d’animer une nouvelle fois l’engin. Carnot conclut donc une évolution menant les systèmes à la dégradation et à la mort thermique. On parle alors de déterminisme statistique.

Nous sommes donc en présence d’un paradoxe. D’un côté du spectre, une économie organisée autour de vieux modèles, lesquels prônent une croissance illimitée, de l’autre, des organisations très énergivores, dont la matière première tend à manquer. L’ère de la décroissance ?

Timothée Parrique à l’édition USI 2023

Qu’entendre par « décroissance » ?

« Une réduction de la production et de la consommation pour alléger l’empreinte écologique planifiée démocratiquement dans un esprit de justice sociale et dans le souci du bien-être ».

Une définition signée Timothée Parrique, économiste et auteur d’une thèse sur la décroissance et du livre Ralentir ou périr — L’économie de la décroissance, premier intervenant lors de l’événement. Pour lui, vouloir la sobriété tout en maintenant l’activité économique, c’est comme vouloir freiner tout en maintenant le pied sur l’accélérateur. Cette croyance que l’on pourrait produire plus et polluer moins est inconcevable. De ce fait, le dernier clou sur le cercueil de cette hypothèse de la croissance verte a été posé dans le dernier rapport du Giec.

Qu’est-ce qui la justifie ?

Cet économiste s’est énormément inspiré des travaux de Nicholas Georgescu-Roegen, un mathématicien et économiste hétérodoxe américain, dont les travaux ont servi d’inspiration au mouvement de la décroissance.

« Prenez l’exemple d’une voiture. Il pleut, vous avez un objet lourd à transporter d’un point A à un point B. Vous prenez votre voiture plutôt que d’y aller à pied, vous gagnerez ainsi un temps précieux à l’abri de la pluie. Généralisez ce schéma à tous les habitants qui disposent d’une voiture. Entre le temps consacré à votre travail pour payer la voiture, l’essence, l’assurance et le temps passé dans les bouchons, vous allez en réalité moins vite qu’à pied », dixit Thimothée Parrique.

Le problème provient de la capacité de l’être humain à vouloir toujours tout marchandiser, ce qui en retire nombre de bienfaits sociaux. Si nous prenons le graphique ci-dessous, on remarque que les 10 % des plus riches possèdent 76 % des capacités de financement, sont responsables de 48 % des émissions de carbone, et ne sont exposés qu’à 3 % des pertes relatives concernant les émissions. Les 50 % des moins riches sont exposés à 75 % des pertes relatives concernant les émissions, ne sont responsables que de 12 % de ces émissions, et ne possèdent que 2 % des capacités de financement.

L'économie de la croissance

Dans une société marquée par des riches toujours plus riches et des pauvres toujours plus pauvres, et dans un monde voué à disparaître si nous ne cessons pas d’essorer la planète, parce que guidés par une logique productiviste dont nous ne voyons plus le bout, l’heure n’est-elle pas venue de penser à basculer vers des modèles plus sobres ? Vers la décroissance ? Et tant pis pour le PIB.

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