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Nikki Haley, une nouvelle candidate au profil étrange, va tenter de déloger Joe Biden.
L’ancienne gouverneure de Caroline du Sud, qui fut le porte-voix de Donald Trump aux Nations unies, s’élance dans la course aux primaires républicaines. Elle affrontera son ancien patron…
Comme toujours aux États-Unis, l’excitation est surjouée. Une petite musique un brin country recouvre la bande passante. Sur l’écran défilent les images de Bamberg, un coin perdu de Caroline du Sud. Et voici Nikki qui surgit. Nikki Haley, ex-gouverneure de Caroline du Sud. Son sourire aux dents blanches, élimées, semble parti pour lui décrocher la mâchoire. Rictus étudié d’une impétrante qui en veut.
Dans ce clip où elle déclare son désir présidentiel, on l’observe sous toutes les coutures. La voici qui fait l’accolade à de charmants retraités, qui couvre d’amour de braves bambins… La musique change, pianos et violons sonnent en cœur, tandis qu’elle relate son enfance modeste. Elle, la fille d’immigrés, « ni noire, ni blanche », devenue coqueluche du Parti républicain… Il faut bien faire pleurer Margot.
La quinquagénaire veut passer pour la brune d’à-côté, la voisine sympa qui vient vous apporter des gâteaux, façon Desperate Housewives. On donnerait le bon dieu sans confession à cette femme visiblement bien sous tous rapports. Le bon dieu ? Pas la peine. Elle se contentera du bureau ovale.
Cette figure de l’establishment entretient le flou
Pour l’instant, pas grand monde n’y croit. Biden, malgré son état de santé précaire, semble bien accroché à son siège – même s’il devra faire face à une primaire. Pour un président en exercice, c’est une première depuis Jimmy Carter. Chez les Républicains, le match est pour l’heure monopolisé par Donald Trump, déjà déclaré, et le gouverneur de Floride ; le libertarien Ron DeSantis.
Le premier bénéficie d’une expérience de président et d’une base militante dynamique, le second a la fougue de la nouveauté et dispose un état-clef dans la bataille. Nikki Haley n’a rien de tout cela… Seulement un grain de folie qui la pousse à croire en ses chances. Et certains relais puissants à Washington, au cœur du complexe militaro-industriel…
Elle rêve de mettre à la retraite le duo des Biden-Trump
Pour l’heure, elle fait la quête, comme à la messe le dimanche. Il lui faut récolter les millions de dollars nécessaires à son rêve éveillé. Quel programme politique ? Pas grand chose. Elle se contente de répéter à qui mieux-mieux qu’il faut « passer à une nouvelle génération ». Sous-entendu, mettre à la retraite le duo vermeil des Biden-Trump.
Trump ? Elle fut pourtant à son service. Début 2017, le président aux mèches blondes la bombarde à l’ambassade américaine aux Nations unies. Étonnant, car elle avait pourtant fait campagne contre Donald Trump… L’homme n’est pas si rancunier. De plus, elle ne bénéficiait d’aucune expérience internationale, puisqu’elle était alors simple gouverneure de Caroline du Sud…
Une néo-conservatrice en défense de l’ordre établi
La voilà nommée à un poste stratégique dans l’administration ; puisqu’elle siège même au « Cabinet », l’équivalent de notre Conseil des ministres. Elle est une ministre bis des Affaires étrangères. Installée autour de la table en fer à cheval du Conseil de sécurité ; elle se livre à des duels de cow-girls avec ses homologues internationaux. Chine et Russie en tête, deux nations qu’elle considère comme des ennemis de l’Amérique.
Fidèle à la pensée néo-conservatrice, cette radicale tendance « faucon » estime qu’il faut défendre l’intérêt américain « quoi qu’il en coûte », en disciple du géopolitologue Brzeziński. Lorsqu’elle choisit de dénoncer l’accord avec l’Iran, malgré la stupeur des Européens, elle déclare bravache : « On ne met pas du rouge à lèvres à un cochon ». Pas très diplomate !
Candidater au poste de numéro 1 pour mieux devenir numéro 2 ?
Après deux ans de service, elle quitte brusquement New York en fin d’année 2018. Elle émarge désormais au conseil d’administration du géant Boeing, tout en continuant à faire des clins d’œil à la politique. Son autobiographie, With All Due Respect, est un véritable monument d’autosatisfaction où elle cite abondamment son propre nom.
Trump a soupiré à l’annonce de sa candidature, la jugeant « beaucoup trop ambitieuse ». Nikki Haley va devoir louvoyer durant la campagne, car il lui sera difficile d’attaquer frontalement son ancien patron, au risque de passer pour une ingrate. Lui n’aura sans doute aucun scrupule à la rendre chèvre durant les débats…
L’impétrante estime-t-elle vraiment pouvoir convaincre la base du parti ? Certains analystes politiques pensent plutôt qu’elle veut compter les points du match Trump-DeSantis… Et monnayer cher son ralliement. Jusqu’à obtenir, finalement, le poste de vice-présidente ?