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Le chef d’orchestre Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, s’est exprimé lundi 13 mars sur RMC. Il travaille avec les États membres de l’UE pour harmoniser les politiques en matière de déficit public.
Après plusieurs milliards d’euros accordés aux ménages et aux entreprises durant la crise sanitaire, l’année 2022 devait démarrer sur les chapeaux de roues. Coup de théâtre, la guerre en Ukraine est déclarée et provoque l’envolée des prix de l’énergie. Les gouvernements doivent débloquer de nouveaux capitaux.
Le constat est sans appel, après deux crises successives, les États européens sont contraints d’emprunter. L’Allemagne a par ailleurs annoncé, au désarroi de ses partenaires commerciaux, qu’elle débloquerait 200 milliards d’euros pour compenser la hausse des prix du gaz pour ses entreprises.
Le responsable du Marché intérieur a immédiatement réagi quant à la coordination des règles sur le marché européen. Thierry Breton et Paolo Gentiloni, commissaire européen aux Affaires économiques et financières, ont rédigé une tribune. Celle-ci propose de créer un fonds commun. À l’image du plan « Sure », celui-ci avait permis, durant la crise covid, d’aider les États à financer le chômage partiel.
En effet, les deux compères s’inquiètent d’une possible fragmentation du marché européen. « Comment les États membres qui ne disposent pas des mêmes marges budgétaires pourront-ils, eux aussi, soutenir les entreprises et les ménages ? Plus que jamais, nous devons éviter de fragmenter le marché intérieur, d’installer une course aux subventions et de remettre en question les principes de solidarité et d’unité qui fondent notre projet européen », ont-ils écrit. D’autant que les États-Unis lancent de leur côté des mesures d’attractivité sans précédent.
Vers la cacophonie ?
Pour la sobriété énergétique, certains pays européens planchent sur l’interdiction de la vente des véhicules neufs à moteur thermique en 2035. Thierry Breton a avancé qu’aucune décision « n’a été prise ». En effet, plusieurs pays européens, réfractaires à l’interdiction, se sont réunis lundi 13 mars à Strasbourg. La semaine dernière, l’Allemagne a bloqué le vote des États membres qui devait entériner la décision, en refusant de donner son feu vert.
« Je le dis aux constructeurs, attendez que la démocratie ait achevé son cheminement pour pouvoir prendre des décisions […] gardez pour l’instant les deux moteurs […] tant que la décision n’est pas finalisée », a poursuivi le commissaire européen, s’adressant aux constructeurs automobiles. La décision sera prise « dans les semaines qui viennent […] laissez le processus parlementaire aller à son terme […] n’anticipez pas ce que la démocratie va faire ».
On cherche le bon tempo pour le secteur énergétique
Thierry Breton est également revenu sur les propos de Bruno Le Maire qui s’était exprimé une semaine plus tôt. « Un marché européen de l’énergie dans lequel le prix de l’électricité décarbonée reste dépendant du prix des énergies fossiles est absurde […] Plus le prix du gaz s’envole, plus cette réalité est perceptible par tout le monde ».
Il faut de la solidarité et surtout de « l’interconnexion », a précisé le commissaire européen. En outre, lors des difficultés énergétiques rencontrées par la France au début de la crise énergétique, l’Allemagne avait ainsi exporté de l’électricité sur le territoire. « Pour les grands consommateurs d’électricité, il faut avoir des contrats à long terme, qui se rapprochent plus des coûts réels de production afin d’être compétitif au niveau industriel en Europe ».
Une guerre de haute intensité
Concernant la guerre en Ukraine, Thierry Breton a insisté. Il faut que l’Union européenne augmente sa production de munitions à destination de l’Ukraine. « Fabriquées par quinze industriels dans onze pays […] Il faut aller très vite, la guerre en Ukraine, voulue par Vladimir Poutine, tragique, se traduit maintenant par une guerre de tranchées, de face-à-face, et c’est évidemment à qui envoie le plus de munitions, d’un côté ou de l’autre ». Il a également rappelé que les Ukrainiens « dépendent » de l’Europe pour les livraisons de munitions.
« L’Amérique est en moins bon état que l’Europe sur la fabrication de ces munitions, les obus de 155 mm, on en fabrique plus en Europe qu’aux États-Unis […] Ce type de munition est essentiellement dédié aux guerres de haute intensité, et c’est vrai que personne n’avait imaginé le retour de guerres de haute intensité, en particulier en Europe », a-t-il conclu.