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Alors que Veolia a formulé une OPA pour s’offrir les 70 % du capital de Suez qu’il ne détient pas, la justice est intervenue.
Passage en force pour Veolia. Dimanche 7 février, le géant des eaux a formulé une offre publique d’achat (OPA) pour s’offrir les 70 % restants du capital de Suez. Pour le moins inamicale. C’est un énième rebond dans l’affaire Suez-Veolia, qui caractérise l’incapacité des deux poids lourds français à s’entendre à l’amiable. La première OPA avait été quelque peu hostile, la seconde semble l’être davantage. Mais lundi 8 février, la justice est intervenue et le tribunal de commerce de Nanterre (92) ordonne à Veolia de suspendre toute OPA sur son concurrent Suez en attente d’un retour – apaisé – au débat.
Veolia en veut bien plus et n’hésite pas à poser sur la table 7,9 milliards d’euros pour s’adjuger les 70 % du capital qu’il ne détient pas. Le groupe dirigé par Antoine Frérot a donc lancé une offre publique d’achat à hauteur de 18 euros par action sur le capital restant. Une offensive qui passe très mal auprès de Suez : « Une démarche hostile de Veolia et un dépôt d’offre illégale. » Et pour cause, Veolia avait assuré s’engager avec « amicalité » dans le processus qui le lie à Suez. Mais face à des échecs successifs, Veolia a passé la seconde, « ses tentatives répétées d’amicalité, réitérées dans sa proposition d’offre du 7 janvier 2021, se sont toutes heurtées à l’opposition », peut-on lire dans un communiqué de la multinationale française.
Veolia avait déjà acquis 29 % du capital
L’affaire Suez-Veolia ne date pas d’hier. Pour rappel, en octobre 2020, Antoine Frérot et compagnie avaient déjà remporté une première bataille. À coup de 3,4 milliards d’euros auprès d’Engie, qui détenait à l’époque les fameux… 29,9 % du capital de Suez. Engie n’avait pas vraiment d’intérêt à attendre, l’offre de Veolia était la seule sur la table puisque le fonds d’investissement Ardian, dirigé par Dominique Senequier avait – temporairement – jeté l’éponge. Dommage pour Suez pour qui le fonds aurait pu – grâce à des discussions plus amicales – le sauver de Veolia.
Déjà à l’époque, l’opération était mal reçue – d’abord auprès de Suez qui « prend acte de la reprise par Veolia de 29,9 % de son capital, d’une manière hostile et dans des conditions inédites et irrégulières » – mais aussi auprès du ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire : « Les mariages de force, je n’y crois pas. Ça ne marche pas dans la vie et ça ne marche pas dans la vie des affaires. La position de l’État a été constante, il faut un accord amiable entre Suez et Veolia. […] Nous étions à quelques centimètres d’un accord. Nous nous sommes heurtés à l’intransigeance des uns et à la précipitation des autres. Je le regrette. […] Je souhaite que les discussions reprennent tout de suite », avait-il déclaré à l’issue du premier acte. Une mise en garde incomprise.
Le tribunal du commerce réagit
Mais, dimanche 7 février au soir, une nouvelle étape a sans doute été franchie. Et l’hostilité-amicalité s’est encore élevée d’un cran. Avec presque 8 milliards d’euros engagés, Veolia veut clairement reprendre l’intégralité du capital de Suez. Une nouvelle fois, Veolia manque à son engagement d’amicalité, la justice réagit dans la foulée via le tribunal du commerce de Nanterre, saisi par Suez. Il ordonne à Veolia de suspendre toute offre publique d’achat sur son concurrent qui ne serait pas approuvée par le conseil d’administration du groupe dirigé par Bertrand Camus. Bruno Le Maire a de nouveau martelé la nécessité de retrouver un dialogue apaisé entre les deux protagonistes : « Je vais répéter une nouvelle fois qu’une opération de cette ampleur, entre deux champions industriels, ne peut réussir que si elle est amicale. »
Pour l’heure, une audience au tribunal devrait se dérouler le 18 février. Pour Suez, si l’opération venait à aboutir et donc si Veolia parvenait à reprendre – en plus de ses 29,9 % – les 71 % du capital qu’il ne détient pas, l’opération pourrait déboucher sur des plans sociaux : « Pour nos 90 000 collaborateurs, dont 30 000 en France, c’est la menace de pertes d’emplois » […] « On ne peut pas annoncer 500 millions de synergies et dire qu’il n’y aura pas d’impact. Je ne l’ai jamais vu de ma vie. Si on regarde Alcatel-Lucent, LafargeHolcim, GE-Alstom, chaque fois, des promesses ont été faites. Chaque fois, il y a eu des plans sociaux après », expliquait en septembre 2020 le président du conseil d’administration de Suez, Philippe Varin. Eh bien, le retour à l’amiable est loin – mais très loin – d’être gagné… GW